vendredi 26 novembre 2010

Comment peut-on être parisien?

On me demande (parfois), ces dernières semaines, ce que je deviens – parce que le blog est moins nourri. Je bosse, je bosse. Je prépare notamment le troisième numéro de C’est dans la poche (les deux premiers sont toujours disponibles), où vous pourrez notamment lire ceci, que je vous offre en avant-première.

Il y a de ces livres qui ne ressemblent à rien de connu et font plaisir. Ni tout à fait blog (bien que les textes soient nés à l’origine sur Internet, Olivier Magny s’en explique plus bas), ni vraiment ouvrage sociologique (quoique certains en pensent), pas seulement humoristique (c’est pourtant assez drôle), Dessine-moi un Parisien est un livre qui rebondit sur les clichés et dont l’auteur, Parisien, se moque (aimablement) de lui-même.
Au point de départ, c’est le vin qui intéresse Olivier Magny. Il a porté la bonne parole (aimez le vin français, il vous le rendra au centuple, on simplifie, bien sûr) un peu partout dans le monde avant de se réinstaller à Paris. Dans un bar à vin, cela va de soi.
Le poste d’observation semble idéal, si l’on en croit le résultat.
Il est possible de le chicaner un peu : d’un chapitre à l’autre, certaines redites donnent à penser que le livre a été écrit trop vite. Mais, après tout, il n’est pas vraiment conçu pour se lire d’un seul élan. Il vaut mieux l’avaler à petites gorgées, le laisser reposer, le reprendre. Toute la saveur est dans la modération.

Tous les animateurs d’un blog doivent se le demander : comment se fait-on remarquer par un éditeur au point de susciter chez lui le désir d’un livre ?

Aussi surprenant que cela puisse paraître, je ne me suis jamais considéré comme un « blogueur ». À dire vrai, le principe même des blogs me dérange. Tous ces gens qui se racontent, avec immodestie et sans pudeur, ne disent je trouve pas grand-chose de bon sur eux comme sur l’époque que l’on vit. Je ne lis donc jamais de blog. Et quitte à écrire quelque chose qui dans la forme s’apparente à un blog, je me suis dès le début de cette aventure fixé une règle cardinale : ne jamais parler de moi.
Peut-être ceci a-t-il contribué à rendre mon « blog » plus sympathique pour les lecteurs – car il parlait d’eux bien plus que de moi. Pour le reste, il faut, je pense, savoir écouter. Les commentaires aident à savoir si l’on est dans le juste. Si ce que l’on écrit résonne. À titre personnel, j’ai eu beaucoup de chance. La chance qu’Emmanuelle Heurtebize, directrice éditoriale, fût un jour assez audacieuse et imaginative pour voir dans ce blog écrit en anglais un livre écrit en français. Je lui dois une bonne partie de toutes les belles choses qui m’arrivent aujourd’hui.

De la note publiée sur Internet à ce qu’elle devient dans le livre, quel genre de travail avez-vous effectué ?

Un travail tout d’abord de traduction. Il m’a ainsi fallu trouver un style en français. La mécanique de l’écriture en anglais était bien rodée. Il fallait trouver de la justesse et du beau en français. Aller chercher de l’humour et du souriant derrière les mots sérieux du français. Une fois les textes bouclés, vint le travail d’illustration effectué par Marie Sourd. Son talent est une véritable bénédiction pour le livre. Chaque article est illustré, de la plus fine des façons, avec humour là encore et un style très enlevé.

Avez-vous pensé aux Lettres persanes de Montesquieu en vous demandant comment on peut être parisien ?

J’ai simplement essayé de faire ni trop faux, ni trop mal fichu. Je n’ai jamais espéré faire vrai ou joli. L’idée d’ouvrir les Lettres persanes et de me dire « Tiens, voyons comment il a bricolé ça le baron » ne m’a jamais effleuré. Et puis, à sa différence, je suis j’en ai peur juge et partie dans cette histoire.

Comment éviter la caricature ? Vous semblez mettre tous les Parisiens dans le même sac…

Beaucoup d’amis, de lecteurs me disent « oh, tu devrais écrire un article là-dessus. » Et le plus souvent, je m’en garde car une autre règle que je m’applique est que ce que j’écris dans ce livre doive fonctionner pour tous les Parisiens (le plus grand nombre en tout cas). Par-delà les âges, les quartiers, les classes sociales, les opinions politiques et les sociotypes. Ce livre n’est donc pas un livre qui décrit les bobos ou les csp+. Il décrit les Parisiens dans ce qu’ils ont en commun, de la vieille dame un peu chic au jeune étudiant négligé.

Au fond, puisqu’il ne s’agit pas vraiment de sociologie, avez-vous surtout voulu écrire un livre amusant ?

Oui. Quand je vois que dans certaines librairies, on trouve Dessine-moi un Parisien au rayon sociologie, je m’interroge sur ce qui doit être publié en sociologie de nos jours… Ce livre est avant tout un livre souriant. Qui je l’espère brosse un portrait dans lesquels les Parisiens se reconnaîtront et dont les autres se délecteront. Si en creux des choses sont dites, c’est tant mieux. C’est en tout cas l’équilibre que j’ai essayé d’établir entre justesse du trait et dérision affectueuse.

Les tics, les attitudes que vous décrivez sont-ils aussi les vôtres ?

Certains, oui. Mais je me soigne, docteur.

mercredi 10 novembre 2010

Goncourt des Lycéens : Inculte !

Non, non, ici, Inculte (avec une majuscule) n'est pas une injure, bien au contraire.
C'est une belle bande d'écrivains, dans laquelle on trouve Maylis de Kerangal, prix Médicis cette année, Claro, pas encore récompensé pour CosmoZ (mais ça viendra, ça doit venir!), et Mathias Enard, dont Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants a reçu hier le prix Goncourt des Lycéens. Vivent les lycéens, qui préfèrent la grâce d'un pont (pas celui de Maylis de Kerangal, cela aurait pu aussi) dessiné par Michel-Ange à la pesanteur d'une œuvre plastique imaginée par Michel Houellebecq!
Forts de leur expérience de lecteurs encore limitée mais déjà subjective (comme il se doit), les membres du jury final se sont exprimés sur leur choix. Dans une dépêche AFP, je relève quelques phrases qui me plaisent beaucoup. Emeline, 18 ans, à propos de La carte et le territoire: "Les phrases manquaient de finition... ou peut-être que ce n'est pas le style qui nous plaît". Ou, pour comparer le Goncourt des adultes et celui des jeunes, François-Xavier, 15 ans: "On préférait quelque chose qui avait une profondeur qu'il n'y avait pas dans Houellebecq". Et pan!
Après la démesure rythmée de Zone, Mathias Enard a écrit un roman bref inspiré par un séjour de Michel-Ange à Constantinople, où le Sultan lui demande de construire un pont. L'artiste ignore s'il en est capable mais, comme il râle sur le pape, il y va. Il se promène, prend des notes (des listes, en fait), esquisse quelques dessins, s'ennuie un peu, s'interroge beaucoup. A-t-il bien fait de venir? On lui avait promis une fortune pour son travail, et les avances sont si maigres qu'il vit chichement.
C'est beau comme un conte occidental trempé dans une pâte orientale, avec l'ambiguïté sexuelle d'un chanteur (ou chanteuse), danseur (ou danseuse) dont la silhouette hante Michel-Ange. C'est beau comme un échec sublime.

lundi 8 novembre 2010

Houellebecq, donc, et Virginie Despentes

Il n'y a pas eu de surprise. Et, comme moi qui l'annonçais avec quelques heures d'avance sur le résultat officiel, l'académie Goncourt a brûlé les étapes: 1'29" de délibération, un prix attribué au premier tour (comme l'an dernier, où Bernard Pivot faisait la gueule parce qu'il n'y avait pas eu de débat) dès 12h47 (au lieu de 13 heures, pour faire l'ouverture des journaux télévisés) à Michel Houellebecq.
Le prix Renaudot était moins prévisible. Et les jurés se sont presque écharpés. Il a fallu 11 tours de scrutin pour que Virginie Despentes et son Apocalypse bébé soit couronnée avec quatre voix, de justesse devant Dolce Vita 1959-1979, de Simonetta Greggio, trois voix - dommage, je viens de le lire, et c'est formidable -, et deux voix encore à ce qui semblait presque un gag, le roman autoédité d'Edouard Nabe, L'homme qui arrêta d'écrire.
Il y avait deux autres prix Renaudot.
Pour l'essai, Mohammed Aïssaoui est le lauréat avec L'affaire de l'esclave Furcy.
Et, pour le livre de poche, c'est Fabrice Humbert avec L'origine de la violence.
Tout cela fait un beau palmarès, n'était le cas de Michel Houellebecq dont je vous ai longuement entretenu tout à l'heure. (Et, si vous l'avez manqué, c'est ci-dessous.)

Michel Houellebecq, le jour de gloire?

La grande majorité de ceux qui écoutent et décodent les rumeurs parisiennes autour du prix Goncourt (aujourd'hui à 13 heures) pensent la même chose que moi: Michel Houellebecq sera le lauréat du prix Goncourt 2010 pour La carte et le territoire.
Au contraire de la majorité de cette majorité, je ne pense pas que ce soit une bonne chose. (Sinon pour avoir cette question derrière nous, et qu'on n'en parle plus, la prochaine fois qu'il sortira un roman à la rentrée.)
Vendredi, Fannie Rascle, une journaliste d'Europe1, cherchait presque désespérément des opposants au Goncourt pour Houellebecq. Elle m'a téléphoné, comme elle (ou sa collègue Amélie Bertrand, qui a rédigé l'article avec elle) avait téléphoné à Abeline Marjorel (du site Chroniquesdelarentréelittéraire.com), Jean-Marc Parisis (Le Figaro) et Marie-Rose Guarniéri, libraire. Les deux premiers pour, la dernière contre.
Voici comment ce que je lui ai dit a été résumé sur le site d'Europe1:
Le thème choisi par Michel Houellebecq est "sans doute intéressant", mais pour Pierre Maury, interrogé par Europe1.fr, le compte n’y est pas. "Sur le plan littéraire, il y a quelque chose de pesant, il n’y a pas d’innovation. C’est comme s’il suffisait d’entreprendre une démarche d’écriture sur notre monde, et après on pourrait écrire n’importe quoi. Il n’est pas classique, il est quelconque", assène-t-il. Et "ça n’a rien à voir avec le personnage Houellebecq", tient à préciser Pierre Maury. "Il peut être énervant c’est vrai, mais ce sont ces livres qui m’énervent", ajoute-t-il. "Il se dit beaucoup qu’il est temps qu’il ait le Goncourt, mais s’il l’a, je ne suis pas sûr que ce soit pour de bonnes raisons", conclut le critique littéraire.
Je regrette qu'elle n'ait pas précisé un "détail" qui me semblait avoir son importance: vendredi, au moment de notre conversation, je n'avais pas encore lu La carte et le territoire, et mon jugement ne reposait que sur les autres livres de Michel Houellebecq - je l'avais répété plusieurs fois.
Ceci dit, maintenant que j'ai lu La carte et le territoire, je n'ai pas changé d'avis. Je m'explique.

Comme il le fait souvent, Michel Houellebecq embrasse une thématique qu'il décline en thèmes secondaires, sur laquelle il construit un récit et plaque des réflexions.
Il est question d'art et de marché de l'art, de démarche créatrice et de représentation du monde. Jed Martin s'est fait connaître par des reproductions de cartes Michelin qui ont servi de support à sa première période et ont fait de lui un photographe coté. Dans une deuxième période, il devient peintre et produit une série de tableaux dans lesquels il introduit des personnes représentatives de la société contemporaine. Au début du roman, il bute d'ailleurs sur une toile dont il n'est pas satisfait, où il plaçait côte à côte Jeff Koons et Damien Hirst, à la manière dont il avait déjà rapproché Bill Gates et Steve Jobs. La dernière toile de cette période, point d'orgue de l'exposition au cours de laquelle ses œuvres vont s'arracher, est un portrait de Michel Houellebecq. Il y aura aussi, chez Jed Martin, une dernière période, dont le résultat ne sera connu qu'après sa mort: vidéaste, il filme des objets en décomposition et une nature triomphant de l'homme (pour le dire vite). C'est d'ailleurs, me semble-t-il, la part la plus intéressante de sa production.
Entre les trois époques, l'artiste se laisse vivre, périodes de latence pendant lesquelles il ne cherche rien et préfère attendre le retour de l'inspiration.
Tout cela ne va pas sans poser de multiples questions et induire des réflexions, comme je le disais plus haut.
A propos de la culture envisagée comme marché, c'est Michel Houellebecq - le personnage - qui fait la comparaison avec la durée de vie d'un appareil photo numérique:
«C'est un beau produit, un produit moderne; vous pouvez l'aimer. Mais il vous faut savoir que dans un an, deux ans tout au plus, il sera remplacé par un nouveau produit, aux caractéristiques prétendument améliorées.
«Nous aussi, nous sommes des produits...» poursuivit-il, «des produits culturels. Nous aussi, nous serons frappés d'obsolescence. Le fonctionnement du dispositif est identique - à ceci près qu'il n'y a pas, en général, d'amélioration technique ou fonctionnelle évidente; seule demeure l'exigence de nouveauté à l'état pur. [...]»
Ce n'est pas faux. Mais ce n'est pas non plus très original. Pas davantage qu'au moment où Jed Martin s'interroge sur sa propre démarche:
[...] il se demanda fugitivement ce qui l'avait conduit à se lancer dans une représentation artistique du monde, ou même à penser qu'une représentation artistique du monde était possible, le monde était tout sauf un sujet d'émotion artistique, le monde se présentait absolument comme un dispositif rationnel, dénué de magie comme d'intérêt particulier.
Ouais... Ce genre de moment arrêté dans le cours du roman fait, pour les uns, le charme de Houellebecq. Charme discutable, selon moi, puisqu'il ne s'agit généralement que de ressasser des lieux communs, sans aucune innovation pour la pensée. Certes, on ne demande pas à un romancier d'être un penseur. Mais, dans le cas qui nous occupe, ce romancier entreprendrait, semble-t-il, de décoder le monde contemporain. Et pourtant, après avoir refermé le livre, ce monde semble devenu encore plus opaque, comme si aucune des explications proposées n'était la bonne. Il faut dire que des explications à l'emporte-pièce font rarement avancer le schmilblik...
Tout le monde a relevé, déjà, que Michel Houellebecq met en scène sa propre mort dans ce roman. Rien d'inédit, là non plus. Mais l'occasion d'introduire une énigme plus proche du polar destinée, peut-être, à alléger un livre touffu et, pour tout dire, étouffant. Dans le genre, il vaut mieux aller voir, comme un policier le conseille à un autre policier, du côté d'un Thierry Jonquet.
Reste ce qui fait, à mes yeux, la principale faiblesse de La carte et le territoire, déjà présente dans les précédents romans de Michel Houellebecq: l'écriture est lourde, appliquée, sans aucune aspérité ni inventivité.
Mais peut-être, au fond est-ce cela qui plaît, puisqu'on ne prend aucun risque littéraire en embarquant dans les quatre cent et quelques pages de La carte et le territoire...

mercredi 3 novembre 2010

Une belle paire de Médicis

Réjouissons-nous ensemble: le jury Médicis a eu le nez fin aujourd'hui. Et, au Soir, nous avions eu le nez creux. A la demande du journal en ligne, Lucie et moi, qui passons nos jours et nos semaines à lire (ainsi qu'à écrire sur les livres que nous avons lus), nous étions réunis dix minutes par téléphone pour décerner, comme un jeu, les prix littéraires du Soir. En nous limitant aux sélections telles qu'elles étaient connues la semaine dernière (et qui sont mises à jour ici), nous avons donc choisi les romans (français seulement) auxquels les différents prix nous paraissaient convenir. Ce n'étaient pas des pronostics, et d'ailleurs nous avions préféré Jean-Marie Blas de Roblès à Éric Faye pour le Grand prix du roman de l'Académie française.
Mais voilà que les choses s'améliorent: hier, le Femina est allé à notre favori; aujourd'hui, le Médicis aussi. Les jurés ont le même bon goût que nous. Et on peut en faire (gentiment) une nouvelle histoire belge chez Bibliobs, cela fait plaisir.
Donc, Maylis de Kerangal reçoit le prix Médicis du roman français pour Naissance d'un pont. Un livre qui tranche sur la production littéraire (envisagée dans son ensemble et en faisant la moyenne, ce qui est bien sûr une sottise). Rigueur, ambition, écriture tenue dans un registre où on se sent bien dès les premières lignes. Il y a tout dans la construction de ce pont envisagée par une romancière capable d'adopter différents points de vue, de nous raconter une histoire, de décrire les paysages, de discuter de la composition du béton... Un roman formidable!
Formidable aussi, celui de David Vann, prix Médicis du roman étranger. Sukkwan Island est, dans le cadre d'une nature hostile (sur une île d'Alaska), le récit d'un échec. Un père a embarqué son fils de treize ans dans une vie à la sauvage, pour un an. Ses motivations sont moins claires que ses déclarations. Et ils ne sont pas vraiment préparés à l'expérience qui les attend. Cela va tourner au drame, on le devine très vite. Mais on ne devine absolument pas la surprise que nous a préparée David Vann au milieu de son livre...
Deux prix excellents, et une belle journée pour la littérature.

Au Renaudot aussi, c'est dans la poche

Je ne suis pas dans les confidences du jury Renaudot.
Et je ne sais pas si l'un ou l'autre des jurés de ce prix a lu C'est dans la poche. (Honnêtement, ça m'étonnerait.)
Mais voyez la jolie coïncidence: hier, alors que venait de paraître le deuxième numéro de ce magazine, la dernière sélection du Renaudot introduit, pour une nouvelle récompense, deux livres de poche.
L'un d'entre eux, d'ailleurs, celui d'Éric Holder (Bella Ciao), a été chroniqué dans le premier numéro de C'est dans la poche. Désolé pour l'autre (L'origine de la violence, de Fabrice Humbert), il était paru plus tôt dans l'année et n'avait donc pas trouvé place dans ces pages.
On en reparlera très vite (la semaine prochaine). Aujourd'hui, c'est jour de Médicis et de premier roman...

mardi 2 novembre 2010

Les prix, c'est l'inflation : trois Femina, deux Virilo

Trois Femina, deux Virilo, c'est le tarif du jour pour les prix littéraires. Et la saison se poursuit plutôt agréablement après le Grand Prix du roman de l'Académie française de la semaine dernière.

Certes, je n'ai pas lu La vie est brève et le désir sans fin, de Patrick Lapeyre, prix Femina du roman français (avec près d'une demi-heure de retard sur l'horaire annoncé, les débats ont dû être serrés). Mais tout ce que j'en ai entendu dire me donne à penser que j'aurai du plaisir à le découvrir le moment venu. Quand il sortira au format de poche, probablement.
Et je ne sais rien, malheureusement de l'Elisée Reclus de Jean-Didier Vincent qui lui vaut le prix Femina de l'essai.

Mais Purge, de Sofi Oksanen, qui avait déjà reçu le prix Fnac, et qui double la mise avec le prix Femina du roman étranger, est un livre formidable. Il y est question de l'Estonie, à l'Histoire complexe et liée à celle de l'URSS autant que de l'Allemagne (pour les années d'occupation pendant la seconde Guerre mondiale). Une jeune femme qui a vécu l'horreur de l'esclavage sexuel alors qu'elle croyait trouver la richesse découvre, dans la maison où a vécu sa famille, ce qu'il reste du souvenir de celle-ci, par Aliide, chargée des secrets du passé. L'atmosphère est aussi lourde que les gestes peuvent être légers, les époques se croisent - des années quarante aux années quatre-vingt-dix. Et la réussite est complète pour cette jeune auteure dont il s'agit du premier livre traduit en français.

Face aux dames du Femina, les moustachus du Virilo ont imposé leurs moustaches (postiches) autant que leurs choix depuis la création de leur prix. Double prix, en réalité.
Le prix Virilo proprement dit récompense le meilleur roman francophone de l'année et va à Emmanuel Dongala pour Photo de groupe au bord du fleuve - paradoxalement couronné pour, je cite le jury, "la description féministe d'une Afrique contemporaine démunie et violentée mais pleine d'espoir et d'humanité."
Et le prix Trop Virilo, qui récompense "la poussée de testostérone littéraire de l'année" va à... une femme, Virginie Despentes, pour Apocalypse bébé. Je cite encore le jury qui justifie ainsi son choix: "Jusqu'à sa fin explosive, le roman tend à prouver que le seul moyen pour devenir complètement femme, c'est d'emprunter les codes virils du mâle."
Je me garderai bien de faire mienne cette interprétation. Et je me contenterai de la satisfaction de voir couronnés deux excellents livres - que j'ai lus et appréciés.

C'est dans la poche : le numéro 2 est disponible

Cela n'a pas été sans mal, pour les raisons que j'explique dans l'éditorial (à lire ci-après), mais voilà: le deuxième numéro de C'est dans la poche est disponible. On peut le lire ou le télécharger dès maintenant sur les sites de Scribd et de Calaméo.
Une astuce: si vous préférez lire en ligne avec deux pages face à face (si donc vous avez la chance d'avoir un bel écran), il vaut mieux suivre le lien Calaméo - le fichier compte une page blanche de plus, après la couverture, grâce à laquelle les articles de plus d'une page seront vus avec la présentation du magazine, telle qu'elle a été conçue.
Les autres liens viendront en leur temps, c'est-à-dire, je pense, très rapidement. Ils seront tous disponibles sur la page dédiée à la revue.
Et voici donc l'éditorial, pour me faire pardonner deux jours de retard (par rapport à ce que j'avais prévu).

À l’heure du bouclage,
Internet rend l’âme…


Les joies d’un bouclage mensuel sont diverses – autant que celles d’un bouclage quotidien, hebdomadaire, ou tout autre rythme de parution que vous pourrez imaginer. Il y a la copie qui traîne, promise pour avant-hier, et pourquoi ce n’est pas encore là ? Je me le demande, je me réunis avec moi-même et je m’engueule. Puisque, jouant ici à peu près tous les rôles (à un article près, qui a failli arriver en retard mais s’est pointé le jour dit, merci Nicolas), je ne peux m’en prendre qu’à moi-même.
Et un peu aussi à mon fournisseur d’accès Internet, qui m’a laissé presque complètement en rade pendant les trois jours prévus pour terminer ce deuxième numéro de C’est dans la poche. Bon, c’est le week-end, lundi est férié. La hotline est ouverte, mais seulement pour prendre les appels. En ce qui concerne la solution du problème, il faudra attendre mardi. Le 2. Un jour de retard sur mes prévisions.
C’est qu’il manque encore quelques couvertures de livres, puisées avec difficultés sur les sites d’éditeurs grâce à une connexion 3G+ de secours. Avec une carte prépayée dont la validité a expiré il y a un mois. Qui lit les indications en petits caractères ? Pas moi. Jusqu’à maintenant. Ça va changer…
À l’exception de ces quelques contretemps, pourtant, tout va bien. Le numéro que vous venez d’ouvrir ressemble, un peu plus que le premier, à ce que je pouvais espérer. Vous me direz ce que vous en pensez.
L’accueil, le mois dernier, a été bon. Excellent, même. Il semble que je sois le seul à avoir vu tous les défauts de la livraison d’octobre. Plusieurs blogs ont signalé l’existence de C’est dans la poche qui, du coup, a pu commencer à exister vraiment, pour au moins 2000 lecteurs.
On m’a suggéré une édition au format epub. Au moment où les liseuses se répandent à toute allure, c’est certainement une bonne idée. Mais il faudrait, pour réaliser cette déclinaison de la version PDF, faire reculer les limites de mes compétences en informatique. Cela viendra peut-être.
La priorité reste cependant de proposer, dans une présentation agréable (qui ne va pas non plus jusqu’à l’élégance que pourrait obtenir un metteur en page digne de ce nom), un contenu solide, basé sur la lecture critique des livres. Et de piocher chaque mois dans l’abondante production des éditeurs au format de poche.
La présence d’un dossier consacré à une collection, un reportage sur «Lire en Poche», des citations au second degré et une page renvoyant vers Internet (quand cela fonctionne) sont les nouveautés de ce deuxième numéro. Avec la présence de quelques auteurs grâce à leurs photographies.
Rendez-vous dans un mois.