samedi 9 mai 2015

La comédie policière et people de Paul Colize

L’année dernière, l’auteur belge de polars Paul Colize avait radicalement changé de ton par rapport à ses précédents livres. L’avocat, le nain et la princesse masquée naviguait sur les eaux troubles du : toute ressemblance avec des personnages connus ne serait peut-être pas fortuite… Au moment où l’ouvrage reparaît au format de poche, décodage en compagnie de l’écrivain.
L’avocat, le nain et la princesse masquée est un polar qui se dévore d’une traite entre Bruxelles, Paris, Johannesburg et Casablanca. Mais surtout parce qu’on y rencontre, dans les toutes premières pages, un personnage qui fait furieusement penser à une top model belge dont les amours et le mariage avec un grand patron français – grand par la surface financière, petit par la taille – ont fait les délices de la presse people.
Dans le roman, elle se fait appeler Nolwenn Blackwell, ce qui sonne mieux, pour sa carrière, que Gisèle Duplat. Hugues Tonnon, un avocat bruxellois spécialisé dans les divorces compliqués, en a vu d’autres. Il est malgré tout impressionné par l’allure de cette femme qui, fiancée à Amaury Lapierre, trompée par lui, veut lui faire cracher son argent. Grosse affaire qui mérite de passer un peu de temps avec la cliente et de l’inviter à dîner au Cercle Royal Gaulois. Il n’était peut-être pas nécessaire, en revanche, de s’enivrer au point de ne plus garder le souvenir précis de ce qui est arrivé après qu’il l’a raccompagnée chez elle. D’autant que les zones d’ombre de la mémoire deviennent très gênantes quand la jeune femme est retrouvée assassinée le lendemain.
Principal suspect, presque coupable désigné par le flic chargé de l’enquête (il a une revanche à prendre sur Hugues Tonnon), l’avocat ne trouve pour issue qu’une fuite constructive : il va trouver lui-même l’assassin de Nolwenn Blackwell. Comment le détective amateur va s’empêtrer avant de dénouer l’énigme, c’est ce qui nous occupera pendant trois cent et quelques pages savoureuses.
Commençons-nous par parler de Jade Foret ?
De qui ? [Rires.] Toute ressemblance avec des personnages existants, etc. J’ai mélangé l’histoire de Jade Foret et Lagardère avec d’autres sujets people. On en a parlé, avec mon éditeur, il y aura probablement des remous mais Lagardère est sur une autre planète. Au pire, le livre sera boycotté dans les Relay, qui appartiennent à Lagardère, comme sur Europe 1 ou dans Paris Match.
Quelle était l’idée de départ ?
C’était de m’amuser. Je sortais de Back up et d’Un long moment de silence qui sont des romans denses, noirs, je désirais faire autre chose. J’ai dû voir la photo du couple, qui donne envie de rigoler, et des bribes se sont ajoutées les unes aux autres. J’ai une amie avocate, spécialisée en divorces, qui m’a raconté beaucoup d’anecdotes dont je me suis servi.
Contrairement aux deux romans précédents, celui-ci est totalement linéaire. Pourquoi ?
Je voulais sortir de l’idée que j’avais une sorte de technique, de recette qui marche : je tirais sur deux ou trois fils, il y avait un retour dans le passé, un personnage dans le temps présent, des titres de chapitres qui correspondent aux derniers mots, une scène de sexe toutes les vingt pages… J’avais peur qu’on dise : on a compris, c’est la méthode Colize ! Donc, le récit est linéaire et écrit au passé simple, les titres des chapitres sont des titres de films, il n’y a pas de flash-back et on passe rapidement sur les scènes de sexe. C’est une comédie policière, comme beaucoup de mes premiers livres.
Quels sont les écrivains que vous admirez ?
Je suis un fan de Sébastien Japrisot pour l’intrigue et, pour le ton, j’aime beaucoup William Lashner dont un personnage récurrent est un avocat intelligent mais un peu miteux et pas très réglo. Toutes les lectures m’influencent plus ou moins. Les SAS, par exemple, que j’ai lus quand j’avais 15 ans, et qui me fascinent quand il y est, par exemple, 23 h 06. C’est un effet stylistique qui m’impressionne. Donc, dans mes livres, il est parfois 23 h 06.
Ou « un ange passa, la photo de mon appartement bien rangé glissé entre les ailes » ?
Oui, c’est un  clin d’œil à Gérard de Villiers. Je glisse plein de choses dans mes livres, des messages à des copains ou des références discrètes…
Vous avez été sélectionné deux fois de suite pour le Prix Rossel, vous avez reçu un beau paquet d’autres prix en France, vous avez préfacé une réédition de Japrisot dans la série « Polars cultes » de « Folio policier ». Comment expliquer cet engouement ?
Je ne l’explique absolument pas. J’ai commencé à écrire comme je joue du piano dans mon salon sans imaginer que je serai un jour sur une scène avec un orchestre philarmonique. Les livres, c’est la même chose, je m’amusais à écrire, puis j’en imprimais cinquante exemplaires que je donnais aux copains. Je n’avais aucune ambition. Mais, quand la coopérative d’auteurs-éditeurs dans laquelle j’étais a cessé de fonctionner, je venais de terminer Back up, j’avais passé dix-huit mois sur le livre, et j’ai quand même essayé les éditeurs. Je l’ai envoyé à cinq éditeurs et trois d’entre eux étaient preneurs. L’aventure est partie comme ça…
Le succès, ça change la vie ?
Oui, je bouge pas mal. J’ai fait une tournée en Bretagne la semaine dernière, dans le cadre d’un prix de comités d’entreprises. Mais c’est davantage en France, où je ne suis quand même pas une star mais où on sait qui je suis et où on trouve mes livres dans les librairies, qu’en Belgique. Ici, on ne me connaît pas.

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