lundi 14 décembre 2015

Hilary Mantel et les intrigues de Cromwell

Thomas Cromwell s’est hissé aux sommets du pouvoir Dans l’ombre des Tudors – titre du premier volume, traduit en 2013 et disponible aussi au format de poche, de l’ensemble romanesque à travers lequel Hilary Mantel retrace sa carrière. Secrétaire du roi Henri VIII, il doit aplanir les difficultés que le souverain provoque lui-même dans sa vie matrimoniale. Henri s’était lassé de Catherine d’Aragon pour épouser Anne Boleyn. Mais Henri rêve désormais de Jane Seymour dont il veut faire sa troisième épouse. Ou sa vraie première épouse, si l’on considère les moyens mis en œuvre pour faire annuler les précédents mariages sous les prétextes les plus divers.
Le pouvoir s’inscrit dans cette période, de septembre 1535 à l’été 1536, jusqu’à l’exécution d’Anne Boleyn. Et, dans la foulée, de quelques hommes. Comme par hasard, ceux qui avaient une responsabilité dans la chute du cardinal Thomas Wosley. Cromwell, fidèle à son maître même après la mort de celui-ci, n’a pas renoncé à le venger. Et sa vengeance est terrible, à la mesure de la place qu’il occupe dans les rouages du royaume.
Thomas Cromwell, rappelons-le à la manière dont quelques nobles se chargent de le lui dire dans le roman, est un homme de basse extraction. Son père était forgeron, ce qui suscite le mépris de quelques grandes familles pour lesquelles il n’est pas digne d’occuper ses fonctions. Mais, qu’on le veuille ou non, son bras est désormais puissamment armé. Et s’opposer à lui est devenu dangereux, à moins d’avoir la possibilité de l’écarter. Ce n’est pas réalisable, au moins pendant cette période. Il tire lui-même les fils des marionnettes qui croient intriguer pour leur propre compte, quand elles ne font, en réalité, que se conformer aux vœux secrets de Cromwell.
Pétri de paradoxes, l’homme est fascinant. Plus exactement : la romancière en a fait un personnage fascinant à travers ses paradoxes. Elle l’anime comme un être de chair, de sang et de convictions. Il est bien mieux qu’une figure historique. Hilary Mantel s’est autorisé, elle l’explique en fin de volume, quelques libertés avec les faits. Elle pouvait se le permettre : les zones d’ombre de l’Histoire sont l’espace où la fiction s’épanouit. Celle-ci en particulier.

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