mardi 25 novembre 2014

Du Sneffels au Stromboli, sous terre

Il y a cent cinquante ans, jour pour jour, paraissait le deuxième Voyage extraordinaire de Jules Verne, si l'on veut bien considérer que Les aventures du capitaine Hatteras n'avaient encore été publiées que partiellement et ne se termineraient qu'en 1866. Faisant donc suite, chronologiquement, aux Cinq semaines en ballon, Voyage au centre de la terre conduit le professeur Otto Lidenbrock, son assistant Axel et Hans Bjelke, engagé comme guide en Islande, du pays de celui-ci à la Méditerranée, en passant d'un volcan à un autre sous l'écorce terrestre...
Ce n'est pas rien, on le reconnaîtra. Et voici une page de cette exploration, extraite de la réédition au format epub effectuée par Gallica.


Le samedi, à six heures, on repartit. Vingt minutes plus tard, nous arrivions à une vaste excavation ; je reconnus alors que la main de l’homme ne pouvait pas avoir creusé cette houillère; les voûtes en eussent été étançonnées, et véritablement elles ne se tenaient que par un miracle d’équilibre.
Cette espèce de caverne comptait cent pieds de largeur sur cent cinquante de hauteur. Le terrain avait été violemment écarté par une commotion souterraine. Le massif terrestre, cédant à quelque puissante poussée, s’était disloqué, laissant ce large vide où des habitants de la terre pénétraient pour la première fois.
Toute l’histoire de la période houillère était écrite sur ces sombres parois, et un géologue en pouvait suivre facilement les phases diverses. Les lits de charbon étaient séparés par des strates de grès ou d’argile compacts, et comme écrasés par les couches supérieures.
À cet âge du monde qui précéda l’époque secondaire, la terre se recouvrit d’immenses végétations dues à la double action d’une chaleur tropicale et d’une humidité persistante. Une atmosphère de vapeurs enveloppait le globe de toutes parts, lui dérobant encore les rayons du soleil.
De là cette conclusion que les hautes températures ne provenaient pas de ce foyer nouveau. Peut-être même l’astre du jour n’était-il pas prêt à jouer son rôle éclatant. Les « climats » n’existaient pas encore, et une chaleur torride se répandait à la surface entière du globe, égale à l’équateur et aux pôles. D’où venait-elle? de l’intérieur du globe.
En dépit des théories du professeur Lidenbrock, un feu violent couvait dans les entrailles du sphéroïde ; son action se faisait sentir jusqu’aux dernières couches de l’écorce terrestre; les plantes, privées des bienfaisantes effluves du soleil, ne donnaient ni fleurs ni parfums, mais leurs racines puisaient une vie forte dans les terrains brûlants des premiers jours.
Il y avait peu d’arbres, des plantes herbacées seulement, d’immenses gazons, des fougères, des lycopodes, des sigillaires, des astérophyllites, familles rares dont les espèces se comptaient alors par milliers.
Or c’est précisément à cette exubérante végétation que la houille doit son origine. L’écorce encore élastique du globe obéissait aux mouvements de la masse liquide qu’elle recouvrait. De là des fissures, des affaissements nombreux. Les plantes, entraînées sous les eaux, formèrent peu à peu des amas considérables.
Alors intervint l’action de la chimie naturelle ; au fond des mers, les masses végétales se firent tourbe d’abord; puis, grâce à l’influence des gaz, et sous le feu de la fermentation, elles subirent une minéralisation complète.

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