On pourrait, au départ,
émettre une hypothèse : le sport est une métaphore de l’existence. Et, à
l’arrivée, constater que Chad Harbach est désormais un des écrivains à l’avoir
démontrée le plus efficacement. Y compris pour des lecteurs européens dont la
plupart ne connaissent ni ne comprennent les règles du baseball, puisque c’est
de ce sport qu’il est question. Les lecteurs se moquent bien d’évaluer ou non
la place d’un arrêt-court sur le terrain, à partir du moment où le pivot de l’équipe
est de toute évidence Henry Skrimshander, avec son talent exceptionnel. Et où
le moment où il bascule de la confiance vers le doute est aussi le déclencheur
d’un certain nombre d’événements majeurs. Dans lesquels s’empêtrent, comme dans
des filets, plusieurs autres personnages de premier plan.
Nous sommes sur le campus
du Westish College, une université du Wisconsin. Mike Schwartz, capitaine de
l’équipe, a pris Henry en charge. Il l’entraîne pour améliorer la technique
qu’il a développée seul – et en lisant L’art du jeu, sa bible. Mais la fragilité de Mike apparaît quand il ne parvient
pas à enrayer la baisse de régime de son protégé. Celui-ci, en même temps, se
rapproche dangereusement de Pella, la fille du président de l’université, qui
vit en couple avec Mike. Tandis que Guert Affenlight, le président lui-même,
jusque-là fou de Melville, ce qui ne prêtait pas à conséquences, tombe amoureux
d’Owen, compagnon de chambre d’Henry. Ces liaisons interfèrent sur l’équipe de
baseball, caisse de résonance du campus qui est également secoué.
Chad Harbach a, nous dit-on, travaillé dix ans
sur la rédaction de ce premier roman d’une rare ampleur, dont chaque élément
éveille des échos plus loin, où toutes les facettes de personnalités très
riches sont mises en lumière au fil du récit. L’ouvrage se lit comme un
feuilleton dont la profondeur de champ aurait été particulièrement soignée. Et,
quand on le referme, on sait que ses protagonistes continueront longtemps de
nous hanter.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire