lundi 25 juillet 2016

En rayon, Japrisot avant Japrisot

Dans la carrière littéraire de Sébastien Japrisot, il y a plusieurs temps. En commençant, cela va de soi, par le premier, des débuts qu'il avait faits sous son véritable nom, Jean-Baptiste Rossi, avec un roman que l'on peut dire, sans exagérer, "de jeunesse". Il avait en effet 17 ans seulement quand les Editions Robert Laffont publièrent, en 1950, Les mal partis. Mieux qu'une promesse. Et aussi, pour ceux qui voulaient y voir une promesse, la satisfaction de voir qu'elle serait tenue. Elle l'aurait peut-être même été davantage si les sirènes du cinéma, qui ont bien occupé Japrisot, ne s'étaient en outre noyées parfois dans l'alcool. Ça se noie, des sirènes? Faut croire que oui, parfois...
Bref, j'ai lu il n'y a pas longtemps un roman que je croyais connaître et qu'en réalité je découvrais, Piège pour Cendrillon, une occasion de revenir à ces mal partis si bien partis, en fait...
C'était l'année où Denis entrait en quatrième. Durant les vacances, on avait repeint les bâtiments et arrangé les cours. Les volets des fenêtres étaient brillants et verts. Les vitres étaient propres. Il y avait de nouveaux fauteuils dans le parloir et des cartes de visite sur les portes, aux étages où habitaient les surveillants. Leurs noms y étaient inscrits. Mais toutes ces nouveautés, les élèves ne les remarquaient pas. Il y avait des bancs et des bureaux neufs qui sentaient bon le propre. Mais les élèves ne les remarquaient pas non plus. Tout ce qui les intéressait en rentrant de vacances, c'était les nouveaux surveillants. Cette année-là, il y en eut un dans chaque division. Visage grave et dos voûté, ils regardaient les élèves lorsque les élèves étaient près d'eux. On leur avait donné une grande feuille avec les noms des élèves indiqués par rang et par place dans la salle d'étude. Même, on avait coché d'une croix rouge les noms de ceux qui n'étaient pas les bons élèves, ceux qu'on appelait les fortes têtes. Avant la première étude, Denis alla voir la feuille sur la chaire. Il monta seul. Les autres étaient en récréation. Il ne rencontra personne dans le hall d'entrée ni dans les escaliers. Comme il s'y attendait, il vit une croix rouge près de son nom, sur la feuille. Il y en avait une aussi près du nom de Pierrot. Il haussa les épaules et descendit dans la cour.

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