lundi 31 décembre 2012

L'autre rentrée littéraire


Après l’avalanche de nouveautés en août et septembre, après la distribution des prix littéraires en novembre, on a à peine pris le temps de souffler que, dès la semaine prochaine, c’est reparti. Les libraires francophones vont à nouveau crouler sous les piles de livres tout frais sortis de l’imprimerie. Succès annoncés et découvertes à faire, la saison s’annonce riche.
La production est en hausse : 520 nouveautés, c’est presque 10 % de plus qu’en 2012. Le marché s’ouvre, espèrent les éditeurs français, en cette année qui suit l’élection présidentielle – événement dont la triste réputation est bien établie : à la fin de chaque quinquennat, les ventes de fiction sont « plombées » par le déplacement des centres d’intérêt vers la politique. En janvier 2013, les esprits seront nettoyés de la pollution d’une campagne électorale et prêts, espère-t-on, à aborder d’autres rivages.
La traduction a le vent en poupe. De l’anglais (et de l’américain surtout) d’abord, tendance lourde qui se reflétera dans les listes de meilleures ventes dès le début du mois de janvier. Le deuxième volume de la trilogie érotico-sado-maso-gnangnan signée E.L. James sort le 3 janvier. Il n’y a aucune raison de penser que la suite de Cinquante nuances de Grey (chez Lattès) sera meilleure que le début. Mais il y a toutes les raisons de croire qu’elle sera achetée encore et encore.
De l’autre côté de l’Atlantique (E.L. James est britannique) nous viennent des écrivains beaucoup plus prometteurs. Jeffrey Eugenides n’en est qu’à son troisième roman avec Le roman du mariage (L’Olivier) mais la puissance de Virgin suicides et de Middlesex, ses œuvres précédentes, fait de chaque rendez-vous avec l’écrivain américain un moment plein d’espoir. Sa compatriote Joan Didion s’est, bien malgré elle, plongée ces dernières années dans les thèmes de la perte et du deuil. Après la mort de son mari, dont elle parlait dans L’année de la pensée magique, elle a dû vivre celle de sa fille adoptive, nœud de son nouveau livre, Le bleu de la nuit (Grasset).
Sur la vague du succès de son gros roman en trois tomes, 1Q84, l’éditeur français du Japonais Haruki Murakami exhume en février deux documents jamais traduits en français et groupés en un seul volume, Underground (Belfond). Après l’attentat au gaz sarin qui avait frappé le métro de Tokyo en 1995, l’écrivain avait enquêté sur les bords opposés de l’événement : côté victimes, d’une part, côté auteurs, de l’autre – des membres de la secte Aum.
Chez les écrivains français, le chéri de ses lectrices, David Foenkinos, revient au roman après l’échec du film réalisé d’après La délicatesse. Il l’affirme : Je vais mieux (Gallimard). Et commence ainsi : « On sait toujours quand une histoire commence. J’ai immédiatement compris que quelque chose se passait. Bien sûr, je ne pouvais pas imaginer tous les bouleversements à venir. Au tout début, j’ai éprouvé une vague douleur ; une simple pointe nerveuse dans le bas du dos. Cela ne m’était jamais arrivé, il n’y avait pas de quoi s’inquiéter. C’était sûrement une tension liée à l’accumulation de soucis récents. »
Le magazine Lire a choisi de présenter à ses lecteurs, dès ce mois de décembre, quatre ouvrages français de 2013. Yasmina Reza publie Heureux les heureux (Flammarion), roman explosé en multiples récits qui se croisent parfois. Catherine Cusset part vers l’Inde avec Indigo (Gallimard), une semaine marquante dans ce pays pour quatre Français. Andreï Makine réalise une variation, une de plus, sur Catherine II de Russie dans Une femme aimée (Seuil), à travers le projet de film conduit par un cinéaste. Et Patrick Rambaud termine avec soulagement sa chronique du règne de Nicolas Ier (comprenez Nicolas Sarkozy) : Tombeau de Nicolas Ier et avènement de François IV (Grasset).
Neuf titres cités parmi 520 nouveautés à paraître dans les deux mois qui viennent, c’est peu. Il y en aura évidemment bien d’autres à lire, d’autant qu’il faut ajouter, aux inédits, les rééditions au format de poche sur lesquelles nous nous focaliserons dans les semaines à venir : le dernier volume de la trilogie de Stieg Larsson, Millénium (Bebel) ; l’énorme succès de Douglas Kennedy, Cet instant-là (Pocket) ; un inédit de Ken Follet, Paper Money (Livre de poche) ; etc.

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