mercredi 5 juin 2013

L'art du jeu et de la vie

On pourrait, au départ, émettre une hypothèse : le sport est une métaphore de l’existence. Et, à l’arrivée, constater que Chad Harbach est désormais un des écrivains à l’avoir démontrée le plus efficacement. Y compris pour des lecteurs européens dont la plupart ne connaissent ni ne comprennent les règles du baseball, puisque c’est de ce sport qu’il est question. Les lecteurs se moquent bien d’évaluer ou non la place d’un arrêt-court sur le terrain, à partir du moment où le pivot de l’équipe est de toute évidence Henry Skrimshander, avec son talent exceptionnel. Et où le moment où il bascule de la confiance vers le doute est aussi le déclencheur d’un certain nombre d’événements majeurs. Dans lesquels s’empêtrent, comme dans des filets, plusieurs autres personnages de premier plan.
Nous sommes sur le campus du Westish College, une université du Wisconsin. Mike Schwartz, capitaine de l’équipe, a pris Henry en charge. Il l’entraîne pour améliorer la technique qu’il a développée seul – et en lisant L’art du jeu, sa bible. Mais la fragilité de Mike apparaît quand il ne parvient pas à enrayer la baisse de régime de son protégé. Celui-ci, en même temps, se rapproche dangereusement de Pella, la fille du président de l’université, qui vit en couple avec Mike. Tandis que Guert Affenlight, le président lui-même, jusque-là fou de Melville, ce qui ne prêtait pas à conséquences, tombe amoureux d’Owen, compagnon de chambre d’Henry. Ces liaisons interfèrent sur l’équipe de baseball, caisse de résonance du campus qui est également secoué.
Chad Harbach a, nous dit-on, travaillé dix ans sur la rédaction de ce premier roman d’une rare ampleur, dont chaque élément éveille des échos plus loin, où toutes les facettes de personnalités très riches sont mises en lumière au fil du récit. L’ouvrage se lit comme un feuilleton dont la profondeur de champ aurait été particulièrement soignée. Et, quand on le referme, on sait que ses protagonistes continueront longtemps de nous hanter.


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