Voici l'autre nouveauté, illustrée, de la collection Bibliothèque 1914-1918 de la Bibliothèque malgache.
Quand paraît, en 1916, la traduction française de Fighting France from Dunkerque to Belfort (Charles Scribner’s Sons, New York, 1915), Edith Wharton possède déjà une solide réputation. Elle a « conquis les suffrages des lettrés français » par le roman, rappelle Francis Chevassu dans Le Figaro du 27 septembre 1916, où il présente ses Voyages au front dans un feuilleton littéraire consacré cependant pour l’essentiel à un livre de René Moulin, La guerre et les neutres.
Même remarque dans La Revue hebdomadaire, le 29 septembre : « dès avant la guerre les lettrés français avaient remarqué et aimé les charmants ouvrages de cette Américaine, éprise du charme latin au point de l’avoir fait sien. »
À présent, écrit dès le 16 juin le Journal des débats, « tous les Français doivent lui être reconnaissants jusqu’à l’émotion de la sympathie qu’elle a bien voulu nous témoigner. » En relevant les qualités qu’Edith Wharton attribue à la France et aux Français, le chroniqueur conclut qu’elle « a bien mérité de notre pays. »
Francis Chevassu n’est pas loin de tirer, de sa lecture, la même leçon favorable à ce pays : « Le livre de Mme Edith Wharton constitue, en même temps qu’une œuvre de valeur, l’un des plus nobles témoignages dont nous puissions nous enorgueillir. »
La Revue hebdomadaire n’est pas moins admirative pour l’ouvrage, mais trouve surtout matière à louanges dans des nuances restées inaccessibles aux deux autres journalistes :
« Mme Edith Wharton aime la France comme une patrie élue, cela est certain, mais elle la juge avec fermeté ; elle ne se laisse aller à l’enthousiasme qu’à bon escient, et non sans nous avoir dit, tendrement, d’ailleurs, mais nous avoir dit, quelques-uns de nos défauts, quand il est nécessaire de les rappeler pour donner toute leur valeur aux vertus acquises ou réveillées. Qu’il est bon, qu’il est réconfortant, quelle fierté heureuse et émue, d’agir, de donner notre effort sous un tel regard amical, – et ce regard, on le devine innombrable, – un regard qui juge les causes, qui nous rend justice, qui nous choisit, qui nous donne tant d’amour et de respect… Vous lirez ce livre où, sans une faute de mesure ni de sentiment, sans littérature, et cependant avec quelles belles et heureuses expressions parfois, Mme Edith Wharton a su conter, juste dans le ton qu’il fallait, non pas en touriste sacrilège, ni en pèlerin mystique hystériquement exalté, – et c’était bien difficile de raconter quelque chose et de ne pas donner dans l’une de ces tares exaspérantes, – a su conter ses voyages aux tranchées, aux lignes de feu, aux pays dévastés, aux pays reconquis ! Vous le lirez, vous qui souffrez tant de toute la littérature qui s’est emparée des reliques et les porte comme l’âne de la fable, et vous le lirez aussi, vous, Français et, surtout… Françaises à qui je pense un peu, je l’avoue, en écrivant cette dernière phrase et qui voudrez, en considérant le tact d’une étrangère qui nous est si fraternelle et en vous efforçant d’y atteindre, ne pas nous faire démériter de ce qu’elle admire le plus en nous. »
1,99 euros.
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