Fils de pasteur, superintendant pendant 26 ans dans un
immeuble de Montréal, Paul Hansen est pour deux ans, à moins d’un kilomètre de
là où il travaillait, en prison. Compagnon de cellule et assurance d’être
laissé en paix par les autres détenus : Patrick Horton, un gros dur,
meurtrier d’un Hells Angel – respect.
Paul avait entamé, en France et sans enthousiasme excessif,
des études de géographie qui l’avaient laissé sur sa faim : « J’aime la géographie des voyages,
celle que l’on traverse à pied, à hauteur d’homme, instruit par les déclivités,
la fatigue des jambes et le caprice des cieux. Beaucoup moins celle des livres
enluminés de graphes et de data. »
Avec un père originaire du Danemark puis émigré au Canada
après les scandales à répétition provoqués par une épouse à la pointe de la
provocation dans la programmation de la salle de cinéma qu’elle gère à Toulouse
– Gorge profonde a été, si l’on ose
dire, la goutte qui a fait déborder le vase –, Paul avait naturellement vocation
à bouger sur la planète. Tout aussi naturellement, il a préféré se rapprocher
de son père, malgré l’atmosphère polluée par l’amiante de la région où il se
trouve, plutôt que de rester en France.
Mais la vie est pleine de surprises, bonnes ou mauvaises.
Du côté des bonnes, il y a eu Winona, sa femme pendant onze
ans, un mélange réussi de sang algonquin et irlandais, pilote d’avion capable
de se poser, selon les conditions de vol, sur terre, sur l’eau ou sur la glace.
Elle a un jour ramené une autre bonne surprise, Nouk, une chienne qui a très
vite fait partie de la famille.
Pour l’équilibre, il est des événements moins agréables, qu’il
faudra découvrir au rythme imposé par le romancier. Il n’en est pas de
meilleur, car Jean-Paul Dubois a l’art de laisser venir les informations à leur
heure, tout en cultivant le don de double vue : en prison, Paul décrit en même
temps un présent monotone dans son ensemble, malgré les saillies de Patrick, et
un passé reconstruit avec l’aide des fantômes bienveillants qui l’accompagnent.
« La prison sommeille, les gardiens
et les détenus dorment, il n’y a que moi qui veille avec à mes côtés Winona,
Nouk et le pasteur. » Ils sont « les
morts les plus vivants de ce monde. Les plus fidèles, les plus aventureux
aussi. »
Jean-Paul Dubois est à son meilleur (sauf peut-être pour le
titre, Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon) dans ce roman. Il sonde les mystères d’un homme et
de ceux qui l’entourent avec une finesse qui suscite l’empathie. Bien que les
raisons pour lesquelles Paul est détenu (elles ne seront révélées que
tardivement, c’est également très bien ainsi) restent une tache dont on ne sait
que faire tant qu’on n’a pas été instruit des détails, il est un de ces
personnages auxquels on s’attache presque malgré soi.
L’écriture y aide, bien entendu, pleine de notations
subtiles et décalées, comme cette description qui, en quelques mots, dit
beaucoup : « Ganz reste près de
moi dans sa posture de douanier sceptique. »
Jean Paul Dubois est mon jumeau. Quand je lis ses livres, j'ai souvent l'impression de revivre ma vie, sans effort et avec plaisir. Merci de me faire découvrir son nouveau roman que je ne connaissais pas.
RépondreSupprimerJ'espère que tu vas bien et suis toujours preneur des nouvelles de Mada et de Tulear que tu aurais le temps de me donner.
Cordialement
François
Je vais bien, les livres de Jean-Paul Dubois sont toujours aussi bien et Toliara est définitivement l'endroit où je devais être. J'y suis, donc, tout est bien.
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