C'est le printemps et Maigret a envie de prendre l'air. Il n'a rien à faire dans les Charentes et le meurtre de Léonie Birard ne le concerne pas. La vieille enquiquineuse n'est d'ailleurs regrettée par personne dans le village de Saint-André-sur-Mer, trois cent vingt habitants et des tas de misérables petits secrets que l'ancienne postière connaissait tous. Mais Gastin, l'instituteur, est venu jusqu'à Paris pour se mettre, selon ses propres mots, sous la protection du célèbre commissaire. Étranger au village, il est certain d'être désigné coupable. On ne l'aime pas beaucoup non plus.
Un autre jour, ces histoires auraient peut-être ennuyé Maigret. «Ce matin-là, avec le soleil qui entrait par sa fenêtre et apportait des tiédeurs de printemps, avec sa pipe qui avait un goût nouveau, il écoutait, un vague sourire aux lèvres, les mots qui lui rappelaient un autre village, où il y avait aussi des drames entre la postière, l'instituteur, le garde champêtre.»
Il se décide d'un coup: il ramènera l'instituteur à Saint-André-sur-Mer, qu'il n'aurait pas dû quitter, et profitera de quelques jours de congé, ce qui ne lui est pas arrivé depuis longtemps, à manger des huîtres et à boire du vin blanc.
Si le vin blanc est disponible en quantité, il n'y a pas d'huîtres, ni même de moules: ce n'est pas le moment. Et la mer ne sent pas assez la mer à son goût. Bref, le séjour est plutôt morne. D'autant que l'enquête, dont bien sûr il se mêle à titre privé, influence son humeur dans le mauvais sens. Tant qu'il s'agit d'observer les gens de l'extérieur, ce n'est qu'un jeu plutôt agréable. Puis le policier devient plus proche de leur comportement, on se surprend à penser comme eux et cela devient beaucoup moins drôle.
En outre, l'affaire implique des enfants et Maigret n'est pas habitué à leur manière de mentir, de travestir la réalité. Il est un peu déstabilisé par une enquête qu'il conduira bien entendu à son terme, à sa manière. Avec un effet très perceptible d'accélération dans les événements, quand l'énigme est sur le point d'être résolue et qu'il a hâte d'en finir, de boucler pour reprendre le train du soir.
«Maigret paraissait un peu triste, ou fatigué, comme presque chaque fois qu'il en avait fini avec une affaire. Il était venu ici pour manger des huîtres arrosées de vin blanc du pays.»
Sous le signe de la déception, voici pourtant un excellent Maigret.
Merci pour toutes ces belles chroniques sur notre auteur liégeois!
RépondreSupprimerLa gastronomie présente dans la série Maigret a permis à Robert Courtine d'écrire Le Cahier de recettes de Madame Maigret.
Ferocias