mardi 12 mai 2009

Content et fâché à la fois...

Comme tout le monde, j'aime mieux lire des livres qui me plaisent plutôt que ceux qui me tombent des mains. Je suis donc content, puisqu'en voici deux que j'ai adorés.
Et je suis fâché, parce qu'une partie du plaisir m'a été ôté en raison de la désinvolture avec laquelle les textes ont été édités.
Je m'explique, sur les aspects apparemment contradictoires de ces lectures.

J'attendais beaucoup de La route, un roman de Cormac McCarthy que je n'avais pas lu l'année dernière lors de sa première parution en français. Les rééditions en poche étant faites pour cela, je me suis donc précipité - et j'ai même failli plonger si vite que mon article du Soir aurait précédé la date de mise en vente si je n'avais pas vu, au dernier moment, que le livre paraissait le 7 mai. J'ai donc postposé ma lecture d'une semaine.
Ce qui ne change rien à ma colère. J'ai rarement vu, chez un éditeur professionnel, un texte aussi maltraité. Une fois par page environ, ce qui me fait penser à un transfert approximatif (et non relu ensuite) de fichier entre l'édition originale et le poche, il manque quelques lettres qu'il faut deviner, ou un mot est coupé en deux morceaux séparés par un espace, sans raison. Cormac McCarthy aurait été un écrivain attaché aux recherches formelles, je me serais peut-être dit qu'il avait voulu innover. Mais ce n'est pas le cas. Et il y a donc de quoi être fâché.
D'autant que le roman est splendide. La descente vers le sud d'un père et de son fils après un genre d'apocalypse qui a laissé peu de survivants est une leçon de vie comme il y en a peu. Ils marchent, confrontés à ce qui reste d'un monde où la violence est devenue la seule loi. Ils savent que la mort est présente à chaque pas, qu'elle les attend, qu'ils n'y échapperont probablement pas. Une grande douceur habite pourtant ces pages, douceur d'autant plus forte qu'elle contraste avec les pires cruautés. Un prix Pulitzer mérité pour un écrivain qui a déjà écrit bien d'autres grands livres...

Je ne savais pas, en revanche, sur quoi j'allais tomber avec La mort au coeur, de Gianni Biobillo. Mais j'avais besoin d'un polar qui se passait à Milan, je n'allais pas chicaner puisque j'en avais trouvé un récemment traduit.
La surprise est bonne, j'y reviens. Et mauvaise pour le soin (ou, plus exactement, le manque de soin) avec lequel la traduction a été corrigée. Moins tragique que le cas précédent, celui-ci n'en est pas moins inacceptable. Des coquilles parsèment le livre à intervalles trop brefs. Je n'ai pas pris la peine de les relever, parce que je voulais rester sur l'élan de la lecture. Mais je me souviens d'une gifle qui, quelques lignes plus haut, devient une giffle!!! Belle cohérence...
Ceci étant dit, parce qu'il fallait bien que je déverse ma bile quelque part, voici un roman qu'il n'est pas facile de lâcher une fois qu'on l'a commencé. En particulier parce que les personnages, très travaillés, ont des caractéristiques qu'on n'oublie pas et qui culminent parfois au sommet du comique. Proche du personnage principal, l'inspecteur Ferraro, son collègue Lanza, qui ne parle qu'au premier degré, génère des conversations qui pourraient être sans fin. Pareil pour Comaschi, quoique ce serait plutôt à cause de son troisième degré. Pourquoi ne pas rigoler sans cesse quand on trempe toute la journée dans la saloperie? La saloperie ne manque pas ici. Si j'osais un cliché - j'ose -, c'est digne d'un excellent polar américain.

Ce qui ne me fait pas oublier la question que je me pose devant ces deux livres: que font les correcteurs? A-t-on même fait appel à eux? Je n'ai pas la réponse...

2 commentaires:

  1. J'en remarque en effet de plus en plus, y compris d'ailleurs dans "Gabriel Effléor".
    Je m'étonne d'ailleurs que les lecteurs me disent plus volontiers qu'ils en ont trouvé chez moi, puis quand je leur signale que, par exemple, le dernier Blasband en était truffé, ils acquiescent. Comme si, de premier abord, les coquilles étaient réservées aux "petits" livres. En fait, le lecteur va, et je m'en étonne, plus facilement "ignorer" les grossièretés dans un livre qu'ils ont payé 25 € et "appuyer fortement" celles qu'ils ont trouvées dans le petit livre d'une petite édition. De là à dire qu'ils font davantage attention à l'orthographe chez certains, pensant qu'une grande maison d'édition ne ferait pas d'erreurs, il n'y a qu'un pas que je franchis vite...
    Amitié

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  2. Merci pour cet article qui me pousse à croire que le métier que j'aspire à faire (correctrice) n'est pas mort, contrairement à ce que l'on me bombarde de toutes parts ...
    J'envisage de faire un petit "book" de référencement de coquilles en tous genres, pour prouver à mon entourage que mes ambitions ne sont pas désuètes. Merci pour votre billet !

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