mercredi 26 septembre 2012

Geneviève Damas, prix des Cinq continents de la Francophonie

Geneviève Damas avait déjà reçu l'an dernier, en Belgique, le prix Rossel pour son premier roman, Si tu passes la rivière. Son audience s'élargit tout à coup avec, hier, pour le même livre, le prix des Cinq continents de la Francophonie.
La cérémonie de remise de cette distinction aura lieu le 11 Novembre 2012 à Toulouse, dans le cadre du Salon du livre Midi-Pyrénées.
Le jury, réuni le 24 septembre au siège de l’OIF a qualifié ce roman « d’une rivière comme la frontière entre le silence et le langage, le message et la vérité, le mimétisme et la naissance à soi-même ; la parole d’un enfant qui naît comme un balbutiement pour atteindre la force du cri : un hommage à la vertu libératrice de l’écriture ».
Née en 1971, Geneviève Damas est une comédienne, metteur en scène et auteur belge. Après une licence en droit à l’Université de Louvain, elle suit une formation de comédienne à l’IAD-Théâtre puis se tourne vers la comédie et la mise en scène du théâtre et de l’opéra. Depuis 1999, elle organise les soirées littéraires et musicales « Portées-Portraits ».
La lauréate a été choisie parmi les 10 finalistes de l’édition 2012, ressortissants des 8 pays suivants : Sénégal, Liban, Canada-Québec , Maroc, Fédération Wallonie-Bruxelles, Rwanda, Tunisie, et France. Elle succède à la québécoise Jocelyne Saucier, lauréate de l’édition 2011 pour son roman Il pleuvait des oiseaux (Editions XYZ).
Le jury a également été touché par Kuessipan de Naomi Fontaine (Editions Mémoire d’encrier) qu’il a défini comme une « élégie mélancolique consacrée à l’esprit ancien des grands-mères et à cette obsession de mettre au monde ».
Le Prix des cinq continents créé par l’OIF en 2001 permet de mettre en lumière des talents littéraires reflétant l’expression de la diversité culturelle et éditoriale en langue française sur les cinq continents et de les promouvoir sur la scène littéraire internationale. Il est animé par un jury international prestigieux : Lyonel Trouillot (Haiti), Lise Bissonnette (Canada-Québec), Monique Ilboudo (Burkina Faso), Paula Jacques (France-Égypte), Vénus Khoury-Ghata (Liban), Pascale Kramer (Suisse), Jean-Marie Gustave Le Clézio (Maurice), René de Obaldia de l’Académie Française (Hong Kong), Leïla Sebbar (France-Algérie) et Jocelyne Saucier lauréate du prix 2011, qui siégeait pour cette session.
Dès son premier roman, Geneviève Damas manifeste le désir de sortir des sentiers battus et de trouver une voix originale. Celle de François Sorrente qui, à dix-sept ans, ne connaît rien du monde sinon la violence de sa famille et le sentiment de perte créé par le départ de sa sœur. La rivière, qu’il est interdit de traverser, est le symbole d’une frontière au-delà de laquelle se situent tous les dangers mais aussi toutes les expériences. Un curé à la vie paradoxale et une femme généreuse renforceront sa volonté de comprendre qui il est et quel est son destin. Probablement pas en compagnie des cochons qui étaient auparavant ses seuls amis, parce qu’ils ne le trahissaient pas.
Pour goûter le ton de Geneviève Damas, rien de mieux que de lire les premières lignes de son roman:
«Si tu passes la rivière, si tu passes la rivière, a dit le père, tu ne remettras plus les pieds dans cette maison. Si tu vas de l’autre côté, gare à toi, si tu vas de l’autre côté.» J’étais petit alors quand il m’a dit ça pour la première fois. J’arrivais à la moitié de son bras, tout juste que j’y arrivais et encore je trichais un peu avec les orteils pour grandir, histoire de les rejoindre un peu mes frères qui le dépassaient d’une bonne tête, le père, quand il était plié en deux sur sa fourche. J’étais petit alors, mais je m’en souviens. Il regardait droit devant, comme si la colline et la forêt au loin n’existaient pas, comme si les restes des bâtisses brûlées c’était juste pour les corbeaux, si rien n’avait d’importance, plus rien, et que ses yeux traversaient tout.
«Arrête de me crier dessus comme une vache, que je lui ai dit, arrête de crier. Je ne veux rien savoir de l’autre côté. Jamais. Tu n’as pas à te biler. Ton François, il restera. Il n’y aura jamais autre chose.»

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