Que fait-on, quand on porte un nom rendu célèbre par une fonction populaire et qu'on perd son job? En général, on écrit un livre, peut-être même un roman. Claire Chazal, qui risque maintenant d'avoir du temps devant elle, est bien capable de remettre cela. Car, oui, elle l'a déjà fait. La preuve par cette rencontre, en 1997, à laquelle elle n'avait pas semblé prendre plus de plaisir que moi...
Entre deux rendez-vous avec les journalistes qui défilent, dans
un hôtel bruxellois, pour lui poser des questions à propos de son premier roman,
Claire Chazal donne rapidement un ou deux coups de téléphone. « C’est la vie d’une rédaction, j’aime
beaucoup ça, dit-elle, y aller, sentir ce qui se passe. On est quand même cent
cinquante à deux cents à fabriquer ce journal, il est donc important de rester
en contact. »
Il n’empêche que le roman est là et qu’il convient d’en
parler. L’institutrice raconte l’histoire
d’une jeune femme, institutrice (qui l’eût cru ?) en Auvergne après la
seconde guerre mondiale. Partagée entre deux hommes et l’ambition de monter à
Paris, elle se cherche et on devine qu’elle choisira la voie d’une carrière
brillante – comme Claire Chazal ?
« Je suis partie
de l’histoire de mes parents. J’admire, chez eux, leur ascension sociale, leur
courage, leur travail, l’idée qu’il faut quitter son milieu d’origine et s’élever.
Après, le caractère de Jeanne, mon héroïne, s’est forgé au fil des pages et s’est
rapproché du mien. »
On peut se demander pourquoi Claire Chazal, qui avait déjà
publié un livre consacré à Balladur, s’est sentie obligée de passer au roman. Elle
a sa réponse toute prête, qu’elle a déjà dû proposer à cent autres interlocuteurs :
« J’ai toujours attaché beaucoup d’importance
à l’écrit. C’est l’art suprême, d’ailleurs, ancré dans la culture française. Il
y a donc deux choses : c’est une façon de dire aux gens que je ne suis pas
seulement une présentatrice ; c’est aussi une thérapie personnelle, par
rapport au travail que j’accomplis quotidiennement, entre stress et dépression. »
Claire Chazal fait entrer en ligne de compte le sens de sa
vie, au cours de laquelle on n’accomplit que peu de choses, finalement. Parmi
ses valeurs fondamentales, l’enfant et le livre – et, maintenant, les deux sont
faits. Que reste-t-il pour l’avenir ? « Je
ne sais pas, répond-elle… »
Toujours est-il qu’elle a pris une heure ou deux, par-ci
par-là, pour mener à bien l’écriture de ce roman. Capable d’ouvrir, dans sa
tête, le tiroir romanesque entre le journal de treize heures et celui de vingt.
« Il m’est arrivé d’avancer un peu
dans cet intervalle… »
Elle affiche ses goûts littéraires, et d’abord ses dégoûts :
« Je n’aime pas le baroque, le
flamboyant, la débauche d’adjectifs. J’aime les choses sèches, courtes, ramassées,
suggérées. Et j’espère m’en être approchée. »
Malheureusement pour elle, il ne suffit pas d’aligner les
unes derrière les autres des phrases composées d’un sujet, d’un verbe et d’un
complément (c’est à peine une simplification) pour faire vivre des personnages
et leur monde. Elle ne cache pas qu’elle a eu de la chance : après avoir
montré quelques dizaines de pages à un éditeur, celui-ci l’a encouragée à
continuer. Et, c’est tout à son honneur, elle n’est pas dupe de ce qui lui
arrive : « Je pense avoir un
grand privilège puisque j’ai été éditée et que je suis un peu vendue. Mais, parfois,
je me dis que c’est usurpé. Parce que, bien entendu, je sens très bien que je
suis éditée parce que je suis à la télévision. Et les gens achètent le livre
parce qu’ils espèrent y trouver quelque chose de moi. »
A la question : « Pensez-vous que, si vous n’aviez
pas été Claire Chazal, votre roman aurait eu une chance d’être publié ? »,
elle n’oppose qu’une réponse timide : « Je
ne sais pas. J’espère que oui… »
Ce n’est pas plus convaincant que le texte, sur la lecture
duquel il vaut mieux juger un livre plutôt que sur la notoriété de son auteur. Comment
le dire autrement ? L’institutrice
est un roman de débutante à qui il est difficile de prévoir un avenir d’écrivain…
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