Le 4 septembre 2019, il y aura trente ans que Georges Simenon est mort.
Les Editions Omnibus saisissent l'occasion pour rééditer, du 31 janvier au 4 avril, les dix volumes de Tout Maigret, avec de nouvelles couvertures signées Loustal et des préfaces inédites.
Je saisis l'occasion pour entreprendre la lecture ou, selon les cas, la relecture, de cette intégrale, dans l'ordre de rédaction des ouvrages (selon Wikipedia).
Mon agenda me dit que nous sommes, depuis quelques heures, en 2019. On commence donc aujourd'hui.
Georges Simenon se met à l’épreuve
d’une spécialité déjà pratiquée dans ses vies précédentes, sous différents
pseudonymes : le roman policier, avec un personnage récurrent qui va
l’accompagner longtemps. Avec le commissaire Maigret, il convient de montrer
que l’auteur sait de quoi il parle, quitte à déstabiliser le lecteur pour bien
lui faire comprendre qu’il va découvrir le dessous des cartes, démonter les
mécanismes les plus mystérieux de la Sûreté parisienne. Voici donc, d’emblée,
jeté là pour nous faire participer aux jeux de codes, un télégramme
incompréhensible : « Xvzust
Cracovie vimontra m ghks triv psot uv Pietr-le-Letton Brême vs tyz btolem. »
Quelques lignes plus loin,
il est obligeamment traduit par Maigret, pour lui-même autant que pour les
néophytes : « Police Cracovie
signale passage et départ pour Brême de Pietr-le-Letton. » Merci, on
n’avait saisi que le nom du personnage en cause, et qui donne son nom au titre
du livre…
Les horaires de chemin de
fer jouent, dans ce début, un rôle majeur. Maigret imagine le parcours de
l’homme surveillé, signalé à Amsterdam, à Bruxelles, bientôt à Paris. Le train
doit se trouver quelque part entre Saint-Quentin et Compiègne, estime Maigret. « Dans la voiture 5, compartiment
G. 263, Pietr-le-Letton était sans doute occupé à lire ou à regarder le
paysage qui défilait. » Il n’y a qu’à attendre, relire le
« portrait parlé » de l’individu (en chiffres d’abord, en clair
ensuite) et se rendre sur le quai à l’heure où arrive le train. Rien de plus
simple, en principe. Voici d’ailleurs une forme d’oreille caractéristique
repérée, cible en vue. Sinon qu’un crime vient aussi d’être constaté dans le
train à l’arrêt et que peut faire un commissaire sinon pratiquer les formalités
d’usage ? En commençant par remarquer une oreille semblable à celle qu’il
avait cherchée et trouvée !
L’énigme n’est pas très
complexe, reconnaissons-le, pas besoin de s’appeler Maigret pour en comprendre
l’essentiel. Nous n’en sommes pourtant qu’aux premières pages, et on ne va
s’ennuyer ensuite. Car Pietr-le-Letton offre à Maigret des sous-énigmes en
forme de puzzle dont les pièces doivent bien finir par s’assembler pour former
un ensemble cohérent. Ce à quoi notre bon commissaire va s’employer avec
patience, non sans une certaine lourdeur qui augmente la force d’inertie selon
laquelle il semble progresser dans son enquête. Jusqu’aux avant-derniers
chapitres, 17e et 18e, au cours desquels le détail des
engrenages est complaisamment fourni autour d’une bouteille de rhum.
On en oublierait presque
que Maigret, au cours de l’affaire, a été blessé, l’occasion pour
Mme Maigret de le dorloter un peu dans les dernières pages.
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