Les héros de Verdun défilent devant Albert Ier
(De l’envoyé
spécial du Petit Journal.)
Front de Verdun,
22 septembre.
Verdun, ce
matin, défila devant la Belgique. Sur l’un de ses champs, Albert Ier
est apparu ; il venait dire à la citadelle que sa victoire était aussi
celle de son pays. Le Président de la République, le général en chef accompagnaient
le roi. Il faisait beau. Les régiments qui, le lendemain de l’affaire des 20 et
24 août, derrière leurs drapeaux, sur ce même terrain, avaient déjà passé,
repassèrent. Alors, ils étaient encore raides de boue et l’héroïque fatigue
battait leur visage aujourd’hui brossés, ils se présentèrent.
Ouvrez le
ban !
Le Président
de la République s’avança vers un général aux cheveux blancs ; ce général
se tenait devant le front des troupes ; son attitude était toute simple,
toute profonde ; il semblait très loin de la cérémonie dont il était le
centre. Un colonel, à haute voix, se mit à lire ; c’était sa
citation :
« Sur le
Grand Couronné de Nancy, a sauvé le pays », entendait-on. Sur cette
poitrine, le président accrocha la médaille militaire ; Curières de Castelnau
était décoré.
Tout un autre
rang s’alignait. Albert s’avança ; il apportait son ordre aux vainqueurs
français. Le premier, c’était le général Fayolle ; il le décora,
l’embrassa ; le second, c’était le général Guillaumat ; il le décora,
l’embrassa ; le troisième, c’était le général Philippot ; il le
décora, l’embrassa. Puis il en décora encore quarante autres, soldats,
officiers, aviateurs, artilleurs ; puis on ferma le ban et les divisions
défilèrent.
Les divisions héroïques
Voici la 5e brigade.
Le 24 août, à quatre heures cinquante, enlevait la cote 304,
s’emparait du bois en Équerre, de la tranchée de Souvin ; le soir, à dix
heures, s’emparait de l’ouvrage de Palavas, de la croupe de Romenot, du Gâteau
de Miel de Lorraine et atteignait le ruisseau de Forges. Prisonniers : 56 ;
prises : douze mitrailleuses, six canons. Le roi des Belges salua.
Voici la 42e division.
Le 20 août, attaque entre le saillant des Caurières et la croupe à l’est
du ravin de la Platelle. Le 26, redonne entre la tranchée du Chaume et la
sortie de Beaumont. Prisonniers : 1 300 ; prises : 48 mitrailleuses,
14 canons dont un de 105. Le roi des Belges salua.
Voici la 165e division.
Le 20 août, attaque au nord de Louvemont, enlève quatre lignes de
tranchées ; le 22, emporte l’ouvrage de Nassau ; le 26, s’empare du
bois de Beaumont. Prisonniers : 1 600 ; prises : 50 mitrailleuses,
4 canons. Le roi des Belges salua.
Voici la 14e division.
Relève, après l’assaut du 20 août, les troupes d’attaque à la cote 344 ;
subit tous les contre-coups, maintient tout. Le roi des Belges salua.
Voici la 25e division.
Le 20 août, à l’aile gauche du dispositif général, attaque sur un front de
2 000 mètres au sud du bois d’Avocourt, atteint tous ses
objectifs ; prisonniers : 750 ; prises : 30 mitrailleuses,
10 canons. Le roi des Belges salua.
Voici la 26e division.
Le 20 août, attaque entre Malancourt et La Hayette, enlève les redoutes
ennemies sur 3 500 cents mètres de largeur et 1 500 de
profondeur ; prisonniers ; 500 ; prises ; 20 mitrailleuses.
Le 24, attaque de nouveau entre Vassincourt et La Hayette, progresse de 2 000 mètres ;
prisonniers : 100 ; prises : 8 mitrailleuses, 4 canons.
Le roi des Belges salua.
Voici la 128e division,
celle de Riberpray ; s’empare, le 8 septembre, du bois Le
Chaume ; le 9, poursuit son succès, organise le terrain qu’elle conserve,
malgré tout ; prisonniers : 800 ; prises : 9 canons ;
le général Riberpray tué à l’ennemi. Le roi des Belges salua.
Voici la
division marocaine. Pardon, elle n’est pas là ; pourtant, le 20 août,
elle prit Régneville.
Voici
l’aviation. Pendant l’attaque de Verdun, elle abattit 74 avions ;
ajoutons-en un de plus ; à l’instant, elle vient d’en descendre un autre.
Entouré de flocons blancs, le Boche s’approchait pour voir la revue. Ce fut le
coup du roi.
Le Petit Journal, 23 septembre 1917.
Aux Editions de la Bibliothèque malgache, la collection Bibliothèque 1914-1918, qui accueillera le moment venu les articles d'Albert Londres sur la Grande Guerre, rassemble des textes de cette période. 21 titres sont parus, dont voici les couvertures des plus récents:
Dans la même collection
Jean Giraudoux
Lectures pour une ombre
Edith Wharton
Voyages au front de Dunkerque à Belfort
Georges Ohnet
Journal d’un bourgeois de Paris pendant la guerre de 1914. Intégrale
ou tous les fascicules (de 1 à 17) en autant de volumes
Isabelle Rimbaud
Dans les remous de la bataille
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire