vendredi 13 juillet 2012

La rentrée chez Gallimard, Tahar Ben Jelloun et les autres

Souvenez-vous de l'an dernier, quand Gallimard fêtait son centenaire et cumulait les récompenses, en commençant par le Goncourt. La rentrée 2012 sera-t-elle aussi faste? Je n'ai pas eu de chance. J'ai commencé par lire le roman de Tahar Ben Jelloun, Le bonheur conjugal, et c'est une énorme déception. Bien sûr, personne ne compte sur un académicien Goncourt pour recevoir un prix de plus, surtout quand son palmarès est aussi riche que le sien. Quand même, ce n'est pas une raison pour donner un livre bâclé - ou qui donne l'impression de l'être -, dans lequel les deux partenaires d'un couple mal assorti passent leur temps à exprimer leurs différends. Plus court, Le bonheur conjugal aurait peut-être été digeste. Au lieu de quoi, ses 360 pages me sont restées sur l'estomac.
Il faudra espérer que le bonheur viendra d'autres titres. Un premier roman, comme l'an dernier? Aurélien Bellanger semble prêt à prendre la relève d'Alexis Jenni. La théorie de l'information (un titre aussi peu romanesque, à première vue, que L'art français de la guerre) débarquera en librairie, le 22 août, précédé d'une rumeur favorable entretenue notamment par Les Inrockuptibles. J'attends de voir, avec espoir.
Ou alors, ce pourrait être l'année de Philippe Djian, dont il me semble qu'il n'avait plus publié depuis longtemps à cette période de l'année, et qui arrive, une semaine plus tard, pour le titre le plus bref de la saison: "Oh...", dans lequel il y a plus de signes de ponctuation que de lettres. En voici le premier paragraphe, on verra plus tard si la suite nous comble:
Je me suis sans doute éraflé la joue. Elle me brûle. Ma mâchoire me fait mal. J'ai renversé un vase en tombant, je me souviens l'avoir entendu exploser sur le sol et je me demande si je ne me suis pas blessée avec un morceau de verre, je ne sais pas. Le soleil brille encore dehors. Il fait bon. Je reprends doucement mon souffle. Je sens que je vais avoir une terrible migraine, dans quelques minutes.
On parle aussi beaucoup de Florian Zeller (La jouissance), mais c'est peut-être surtout parce qu'il vient de changer d'éditeur - avec la coïncidence supplémentaire du rachat de Flammarion, où il avait publié ses précédents romans, par Gallimard.
En fait, c'est sur l'office du 6 septembre que je place mes plus grandes espérances. Il y aura là les nouveaux romans de Fabienne Jacob (L'averse), très remarquée pour ses précédents, d'Alain Blottière (Rêveurs), à qui ses lecteurs sont fidèles pour de bonnes raisons littéraires, et surtout de Pierre Jourde (Le maréchal absolu), pour rappeler que l'auteur de La littérature sans estomac n'est pas seulement un commentateur sévère des écrivains contemporains mais qu'il est aussi un amoureux d'une langue pratiquée avec enthousiasme et appétit. De l'estomac, il en faudra pour les 740 pages d'un livre qui commence en fanfare:
Allons, parle, Manfred-Célestin, vieille pacotille, dis quelque chose, n'importe quoi, tu es plus disert d'habitude. Qu'est-ce qui t'arrive? Ah ça, pourtant, d'habitude, on peut dire que tu m'en racontes! Tu la trembles sans t'arrêter, ta plainte sempiternelle. Robinet à bout de course, mais qui s'obstine à crachoter jour et nuit son filet brunâtre, au prix de force convulsions. Tu es mon secrétaire particulier, à ce qu'il paraît. Ça, pour ce qui est de sécréter, tu sécrètes. Tu sécrètes particulièrement. C'est même ta principale activité dans l'existence.
J'en oublie, à coup sûr. Je n'oublie cependant pas de noter que Gallimard est moins frileux que nombre de ses confrères sur le terrain des premiers romans. Alors qu'il en paraît moins que l'an dernier dans cette rentrée, à Aurélien Bellanger se joignent, sous la traditionnelle couverture blanche filetée de rouge, Clélia Anfray (Le coursier de Valenciennes) et Maria Pourchet (Avancer). Et un encore chez Verticales, une maison appartenant à Gallimard: Branta bernicla, de Pascal Guillet. Et un autre à L'Arpenteur: Le couvre-feu d'octobre, de Lancelot Hamelin.
Il y aura aussi un nouveau roman de Joy Sorman (Comme une bête) et, à L'Arbalète, le deuxième roman de Gaëlle Bantegnie (Voyage à Bayonne). Puisque j'avais beaucoup aimé son premier (France 80), je lirai celui-ci avec un a priori favorable.

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