mardi 18 août 2015

L’été très médiatique de Michel Houellebecq

Non, Michel Houellebecq ne sort pas de nouveau roman à la rentrée. Son rythme est plutôt d’un livre tous les quatre ans, et Soumission n’est pas si vieux puisqu’il est paru en janvier – le jour, on ne l’oubliera jamais, de l’attentat à Charlie Hebdo. Les lecteurs, malgré le contexte ou grâce à lui, à moins que cela n’ait strictement rien à voir et que Houellebecq soit dorénavant planté dans le paysage comme un panneau publicitaire impossible à manquer quand bien même on le voudrait, étaient au rendez-vous : 500.000 exemplaires vendus en France selon Le Figaro Magazine, plus de 600.000 selon Le Monde. On ne connaît pas les chiffres de la police…
Mais, si Michel Houellebecq n’est pas présent comme écrivain dans la rentrée, sa personne, sa personnalité, son œuvre, un peu tout cela et même davantage si vous voulez, occupent les médias mieux que si l’on attendait son prochain opus. Le Figaro Magazine a entamé, le 31 juillet, un feuilleton de quatre pages hebdomadaires (six, même, pour le lancement) dont le quatrième volet paraîtra cette semaine. Et Le Monde a publié, lundi après-midi, sur deux pages, le premier d’une enquête en six articles.
Les deux démarches coïncident peut-être par hasard. Elles sont cependant totalement opposées. D’une part, Jean-René Van der Plaetsen (Le Figaro Magazine) connaît Michel Houellebecq depuis le milieu des années 80, dit-il, et manifeste plus d’empathie que d’esprit critique envers son interlocuteur, qui semble être le véritable organisateur des pages. De l’autre, Ariane Chemin n’a pas rencontré Michel Houellebecq et s’est même heurtée à un véritable mur défensif érigé en catastrophe à l’aide d’amis et de relations interdits de dialogue avec la journaliste. Dont l’initiative pourrait même, explique-t-elle, faire l’objet d’une plante au civil. On ne sait pas trop pourquoi Michel Houellebecq est à ce point remonté contre Ariane Chemin dont il fait le procès en deuxième semaine du Figaro Magazine : « Ce qu’elle fait d’habitude, c’est un mélange de faits vrais, d’affabulations crédibles et d’insinuations malveillantes – en réalité, c’est du niveau de Voici et de Closer. »
Jean-René Van der Plaetsen et Ariane Chemin ne sont pourtant pas en total désaccord. Le premier voit dans la vie que mène Michel Houellebecq en parka et sac à dos le signe qu’« il y a des rêves de nomade chez ce citadin. » La seconde l’envisage, du haut de la tour où il habite dans le 13e arrondissement, regardant vers le périphérique qui lui permet, à volonté, « de s’échapper grâce à la diagonale du fou ».
Heureusement pour Le Figaro Magazine, l’auteur de La carte et le territoire ne prendra pas de vacances avant septembre, moment où il partira en voiture vers l’Espagne. On peut donc passer « Un été avec Michel Houellebecq » sur le papier glacé de l’hebdomadaire, avec par exemple Alain Finkielkraut, qui ne prend probablement pas de vacances non plus, dans le troisième volet de cette saison littéraire. Pendant laquelle le débat sur la laïcité, l’islam et l’identité française aura fait quelques pas de plus, mais en cercle et, donc, sans avancer.
Dans les moments où il ne bavarde pas avec Jean-René Van der Plaetsen, que fait donc Michel Houellebecq au mois d’août ? Des photos, et depuis plusieurs mois, dit-il, sans aucun roman en chantier : « En fait, je ne suis pas capable de faire deux choses en même temps. Je suis assez obsessionnel. »
Ariane Chemin écrit néanmoins, dans le premier article de ses « Six vies de Michel Houellebecq », qu’il est « occupé à travailler sa statue, son futur Cahier de l’Herne, ses interviews au « Fig’Mag’ » et au New York Times, prêt à flinguer et à parer chaque coup, plus parano que jamais. »
Au fond, Michel Houellebecq avait peut-être raison de se méfier…

6 commentaires:

  1. J'aime le ton de ce billet ;-)

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  2. Moi aussi:un souci d' objectivité et de distanciation dans l'analyse, loin de l'hystérie collective, avec un petit clin d'oeil ici et là.

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  3. L'analyse du journalisme impressionniste façon Bacqué/Chemin, c'est plutôt pas mal vu ; c'est à peu de choses près ce que disait Askolovitch qui figurait en personnage secondaire dans un de leurs reportages.

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  4. Je ne regrette décidément pas de vous lire depuis ma prime jeunesse!

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    1. Oh! il y a bien d'autres choses à faire dans la jeunesse... (Mais merci.)

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