Patrick Deville s’est attaqué à un chantier monstrueux dont
il termine un pan à chaque roman. Pura Vida, Equatoria et Kampuchéa circulent
autour de la planète sur trois continents. L’Amérique, le premier d’entre eux
(les autres étant l’Afrique et l’Asie), est de retour, puisque le mouvement est
cyclique, dans son livre le plus récent, Viva.
Trotsky arrive au Mexique en 1937, il fait en train le
chemin de Tampico, son port de débarquement, à Mexico. Pas n’importe quel
train : celui du président. Pas en n’importe quelle compagnie : Frida
Kahlo, dont les « sourcils très
noirs se rejoignent à la racine du nez comme les ailes d’un merle »,
est là pour l’accompagner dans son voyage. Diego Rivera est absent, mais il a
joué un rôle dans l’accueil de Trotsky.
Malcolm Lowry est au Mexique depuis l’année précédente. Il rédige
une nouvelle qui deviendra Au-dessous du
volcan, chef-d’œuvre obtenu à force d’écrire ses échecs, « et lorsque lui manqueront les échecs
veillera à échouer encore, à échouer encore mieux », écrit Patrick
Deville qui rend un hommage discret à Samuel Beckett.
La méthode Deville consiste moins à créer des nœuds dans le
réel qu’à mettre en lumière ceux qui existaient déjà. Retrouver les traces
croisées de Trotsky et de Lowry, donc, avec leurs proches, y ajouter André
Breton, Antonin Artaud, B. Traven, Arthur Cravan, d’autres encore, et
reconstituer à petites touches, avec force détails, l’effervescence d’un lieu à
une époque donnée. Superposer à tout cela ses propres voyages pour relier, à
travers son regard, le passé au présent. Construire, au fond, une œuvre à la
fois très documentée et très littéraire, à la façon d’un puzzle dont chaque
pièce ne prend son sens qu’en compagnie des autres.
Le risque consisterait à laisser fonctionner la méthode pour elle-même, sans nécessité. Mais on n’en est pas là.
Le risque consisterait à laisser fonctionner la méthode pour elle-même, sans nécessité. Mais on n’en est pas là.
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