L’entrée en littérature de Frédéric Verger avec Arden avait été saluée par le Goncourt
du premier roman. Le deuxième, Les rêveuses n’a pas rencontré les mêmes échos, c’est dommage. Car les qualités
du débutant se confirment, bien que sur un ton plus mesuré et avec une audace
moindre. L’écrivain avait d’abord imaginé, en Marsovie, un monde musical et
grouillant de fièvre créatrice sous la menace de la chasse aux Juifs pratiquée
avec entrain par le nazisme en 1944.
Cette fois, pendant la même guerre, mais en 1940, Peter
Siderman, boche et juif, comme il le dit de lui, engagé à dix-sept ans dans
l’armée française, parlant à la perfection la langue de son pays choisi, est
fait prisonnier par ses compatriotes après avoir pris la plaque d’un mort en
même temps que des lettres trouvées sur le cadavre. Il s’appellera désormais
Alexandre d’Anderlange. Et sera libéré parce que sa mère, ou plutôt la mère de
celui dont il a emprunté l’identité, est mourante…
Peter/Alexandre est ramené « chez lui », vers
l’est, dans une partie de France annexée par l’Allemagne. Malgré ses craintes,
il est accueilli avec bienveillance par sa « mère », pas si mourante
que cela, ainsi que par la famille et les proches. Le quiproquo dure,
s’enrichit des relations complexes avec l’occupant, d’une histoire d’amour
complexe, de la crainte toujours présente d’être reconnu pour ce qu’il est – un
imposteur. Cette tension culmine en des moments qui donnent au roman ses pics
dramatiques.
Mais c’est surtout par l’écriture, comme on l’espérait , que
ce livre est remarquable. Entre la lune qui « semblait
boire à l’intérieur des yeux » lorsqu’on la fixait et « les reflets d’un monde lointain,
projetés sur le chemin par une extravagance optique » devant une
colonne de prisonniers, les images frappantes abondent, riches autant de ce
qu’elles montrent que de la manière dont elles sont, au sens le plus fort du
mot, écrites.
Le cap du deuxième roman est une épreuve quand le premier a fait parler de lui : il ne suffit pas d’y montrer la même maîtrise, il faut aussi que les lecteurs aient l’occasion de s’en apercevoir. En attendant la suite, qui devrait selon toute vraisemblance construire une œuvre puissante.
Le cap du deuxième roman est une épreuve quand le premier a fait parler de lui : il ne suffit pas d’y montrer la même maîtrise, il faut aussi que les lecteurs aient l’occasion de s’en apercevoir. En attendant la suite, qui devrait selon toute vraisemblance construire une œuvre puissante.
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