Ceux de l’Aisne décorés par Pétain
(De l’envoyé
spécial du Petit Journal.)
Front français,
10 novembre.
Nous avions
ceux de la Marne, ceux de l’Yser, ceux de la Somme, ceux de Verdun ; nous
avons maintenant ceux de l’Aisne. Et ainsi tout notre pays se pare des lauriers
de ses défenseurs. Le palmarès s’allonge, chaque feuillet marque une bataille,
chaque bataille est une victoire. Pétain vient de célébrer la dernière :
La Malmaison, Pinon, Pargny, Filain. Des milliers de prisonniers, des centaines
de canons, voilà ce qu’offraient ceux de l’Aisne, en échange des décorations
que le général en chef allait accrocher sur leurs drapeaux loqueteux, sur leurs
capotes boueuses.
Il pleuvait
dru et fort, mais cette pluie n’était ni grise ni triste. Et les trois mille
poilus présentaient cette pluie, puisqu’elle fut leur compagne pendant ces
journées d’attaque qui furent des journées de gloire : le terrain de la
revue était un cloaque de boue et de gadoue. Qu’importe ! ça valait mieux
que les trous d’obus, que les tranchées bouleversées de là-haut, et le défilé
fut impeccable. Cérémonie simple et sobre. Tout près, la cathédrale de
Soissons, avec ses tours blessées, hors de portée maintenant du canon dont on
entend le grondement lointain, devant les drapeaux rassemblés, un officier lit
les citations des unités qui vont recevoir une récompense : régiments
d’infanterie, de zouaves, de tirailleurs, de coloniaux, bataillons de
chasseurs, de Sénégalais, artillerie de tranchée, artillerie de campagne,
artillerie lourde, artillerie d’assaut, génie, télégraphistes, brancardiers,
aviateurs, tout le monde a fait son devoir, plus que son devoir. Il y a de la
poudre dans l’air, les drapeaux claquent sous ce vent de victoire, et quand
tout à l’heure, quelques-uns d’entre eux vont incliner leur hampe pour
permettre au général Pétain d’y accrocher la fourragère, il semble que dans les
rangs de cette glorieuse phalange d’hommes, les corps se font plus droits, les
yeux se font plus brillants, et j’ai envie de leur crier : « Vivent
ceux de l’Aisne ! »
Le Petit Journal, 11 novembre 1917.
Aux Editions de la Bibliothèque malgache, la collection Bibliothèque 1914-1918, qui accueillera le moment venu les articles d'Albert Londres sur la Grande Guerre, rassemble des textes de cette période. 21 titres sont parus, dont voici les couvertures des plus récents:
Dans la même collection
Jean Giraudoux
Lectures pour une ombre
Edith Wharton
Voyages au front de Dunkerque à Belfort
Georges Ohnet
Journal d’un bourgeois de Paris pendant la guerre de 1914. Intégrale
ou tous les fascicules (de 1 à 17) en autant de volumes
Isabelle Rimbaud
Dans les remous de la bataille
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