L’année dernière, l’auteur belge de polars Paul Colize avait
radicalement changé de ton par rapport à ses précédents livres. L’avocat, le nain et la princesse masquée naviguait sur les eaux
troubles du : toute ressemblance avec des personnages connus ne serait
peut-être pas fortuite… Au moment où l’ouvrage reparaît au format de poche,
décodage en compagnie de l’écrivain.
L’avocat, le nain et
la princesse masquée est un polar qui se dévore d’une traite entre
Bruxelles, Paris, Johannesburg et Casablanca. Mais surtout parce qu’on y
rencontre, dans les toutes premières pages, un personnage qui fait furieusement
penser à une top model belge dont les amours et le mariage avec un grand patron
français – grand par la surface financière, petit par la taille – ont fait les
délices de la presse people.
Dans le roman, elle se fait appeler Nolwenn Blackwell, ce
qui sonne mieux, pour sa carrière, que Gisèle Duplat. Hugues Tonnon, un avocat
bruxellois spécialisé dans les divorces compliqués, en a vu d’autres. Il est
malgré tout impressionné par l’allure de cette femme qui, fiancée à Amaury
Lapierre, trompée par lui, veut lui faire cracher son argent. Grosse affaire
qui mérite de passer un peu de temps avec la cliente et de l’inviter à dîner au
Cercle Royal Gaulois. Il n’était peut-être pas nécessaire, en revanche, de s’enivrer
au point de ne plus garder le souvenir précis de ce qui est arrivé après qu’il
l’a raccompagnée chez elle. D’autant que les zones d’ombre de la mémoire
deviennent très gênantes quand la jeune femme est retrouvée assassinée le
lendemain.
Principal suspect, presque coupable désigné par le flic
chargé de l’enquête (il a une revanche à prendre sur Hugues Tonnon), l’avocat
ne trouve pour issue qu’une fuite constructive : il va trouver lui-même
l’assassin de Nolwenn Blackwell. Comment le détective amateur va s’empêtrer
avant de dénouer l’énigme, c’est ce qui nous occupera pendant trois cent et
quelques pages savoureuses.
Commençons-nous par
parler de Jade Foret ?
De qui ? [Rires.]
Toute ressemblance avec des personnages
existants, etc. J’ai mélangé l’histoire de Jade Foret et Lagardère avec
d’autres sujets people. On en a parlé, avec mon éditeur, il y aura probablement
des remous mais Lagardère est sur une autre planète. Au pire, le livre sera
boycotté dans les Relay, qui appartiennent à Lagardère, comme sur Europe 1 ou
dans Paris Match.
Quelle était l’idée
de départ ?
C’était de m’amuser.
Je sortais de Back up et d’Un
long moment de silence qui sont des
romans denses, noirs, je désirais faire autre chose. J’ai dû voir la photo du
couple, qui donne envie de rigoler, et des bribes se sont ajoutées les unes aux
autres. J’ai une amie avocate, spécialisée en divorces, qui m’a raconté
beaucoup d’anecdotes dont je me suis servi.
Contrairement aux
deux romans précédents, celui-ci est totalement linéaire. Pourquoi ?
Je voulais sortir de
l’idée que j’avais une sorte de technique, de recette qui marche : je
tirais sur deux ou trois fils, il y avait un retour dans le passé, un
personnage dans le temps présent, des titres de chapitres qui correspondent aux
derniers mots, une scène de sexe toutes les vingt pages… J’avais peur qu’on
dise : on a compris, c’est la méthode Colize ! Donc, le récit est
linéaire et écrit au passé simple, les titres des chapitres sont des titres de
films, il n’y a pas de flash-back et on passe rapidement sur les scènes de
sexe. C’est une comédie policière, comme beaucoup de mes premiers livres.
Quels sont les
écrivains que vous admirez ?
Je suis un fan de
Sébastien Japrisot pour l’intrigue et, pour le ton, j’aime beaucoup William
Lashner dont un personnage récurrent est un avocat intelligent mais un peu
miteux et pas très réglo. Toutes les lectures m’influencent plus ou moins. Les SAS, par exemple, que j’ai lus quand j’avais 15
ans, et qui me fascinent quand il y est, par exemple, 23 h 06. C’est
un effet stylistique qui m’impressionne. Donc, dans mes livres, il est parfois
23 h 06.
Ou « un ange
passa, la photo de mon appartement bien rangé glissé entre les
ailes » ?
Oui, c’est un clin d’œil à Gérard de Villiers. Je glisse
plein de choses dans mes livres, des messages à des copains ou des références
discrètes…
Vous avez été
sélectionné deux fois de suite pour le Prix Rossel, vous avez reçu un beau
paquet d’autres prix en France, vous avez préfacé une réédition de Japrisot
dans la série « Polars cultes » de « Folio policier ».
Comment expliquer cet engouement ?
Je ne l’explique
absolument pas. J’ai commencé à écrire comme je joue du piano dans mon salon
sans imaginer que je serai un jour sur une scène avec un orchestre
philarmonique. Les livres, c’est la même chose, je m’amusais à écrire, puis
j’en imprimais cinquante exemplaires que je donnais aux copains. Je n’avais
aucune ambition. Mais, quand la coopérative d’auteurs-éditeurs dans laquelle
j’étais a cessé de fonctionner, je venais de terminer Back up, j’avais passé dix-huit mois sur le livre,
et j’ai quand même essayé les éditeurs. Je l’ai envoyé à cinq éditeurs et trois
d’entre eux étaient preneurs. L’aventure est partie comme ça…
Le succès, ça change
la vie ?
Oui, je bouge pas mal.
J’ai fait une tournée en Bretagne la semaine dernière, dans le cadre d’un prix
de comités d’entreprises. Mais c’est davantage en France, où je ne suis quand
même pas une star mais où on sait qui je suis et où on trouve mes livres dans
les librairies, qu’en Belgique. Ici, on ne me connaît pas.
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