mardi 26 novembre 2013

Répression aveugle à La Nouvelle-Orléans

Zeitoun, de Dave Eggers, a tout d’un roman. Il raconte l’histoire presque incroyable de Zeitoun (d'où le titre), pendant et après l’ouragan Katrina qui a frappé La Nouvelle-Orléans en 2005. A la différence d’un roman, tout est vrai. Zeitoun est le résultat de trois ans d’entretiens et de recherches pendant lesquels Dave Eggers a longuement rencontré Abdulrahman Zeitoun, son épouse Kathy ainsi que sa famille en Syrie et en Espagne.
La première moitié du récit raconte l’arrivée de Katrina et la survie dans une ville dévastée. Une ville que la littérature a déjà décrite, avant l’ouragan dans En attendant Babylone, d’Amanda Boyen, ou pendant avec L’œil du cyclone, de Stéphanie Janicot, et Ouragan, de Laurent Gaudé – par exemple. Zeitoun propose, pour l’essentiel, le point de vue du personnage principal, et en contrepoint celui de Kathy qui a décidé de quitter la ville avec leurs enfants, tandis que son mari gardait la maison pour la protéger, autant que possible, des intempéries et des éventuels pillages annoncés après celles-ci.
Puis tout bascule. D’un coup, Kathy n’a plus aucune nouvelle de Zeitoun et l’inquiétude monte. A-t-il été attaqué et tué par des voleurs ? Le bilan de la catastrophe est de plus en plus lourd, les soldats sont de plus en plus nombreux. Qu’est devenu son mari ? Après presque deux semaines de silence, Kathy reçoit un rapide coup de téléphone : Zeitoun est en prison et va bien…
Commence alors le récit d’une folie. Complètement dépassées par les événements, la police, l’armée et la garde nationale ont monté dans la gare routière une prison ressemblant à celle de Guantanamo et ont ramassé dans la ville encore inondée tout ce qui ressemblait à un voleur ou à un… Syrien, comme Zeitoun. Accusé d’appartenir à Al-Qaïda avec les trois compagnons d’infortune qui étaient avec lui à ce moment, il est incarcéré pendant plus de trois semaines, sans aucune possibilité de se défendre, sans aucun chef d’accusation, sans rien comprendre, en fait, à ce qui lui arrive.
Dave Eggers est un écrivain fortement engagé en faveur des droits de l’homme. Chez McSweeney’s, la maison d’édition indépendante qu’il a fondée à San Francisco, il publie notamment la collection « Voice of witness », qui recueille des témoignages oraux de victimes de l’injustice sociale. Zeitoun prolonge un ouvrage de cette collection. C’est un livre exemplaire.

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