Paul Fournel m'attend, assis
sur un canapé, dans les bureaux des Éditions de l’Olivier, boulevard du
Montparnasse, où les Éditions du Seuil, déménagées de la rue Jacob vers
Montrouge, ont gardé un pied-à-terre, histoire de rester en ville. Ce déménagement
est le symbole d’une édition française en pleine réorganisation. Moins
artisanale, plus industrielle – pour les grandes maisons. Le quartier des
éditeurs y a perdu son âme, à moins que les boutiques de fringues aient une âme
aussi ? Ce n’est pas certain. Une édition qui doit intégrer la révolution
numérique, aussi, toute une nouvelle culture devant laquelle, souvent, elle se
trouve désemparée. C’était le sujet du précédent livre de Paul Fournel, La liseuse, sorti en janvier.
Aujourd’hui, un nouvel ouvrage est prêt à
paraître le 7 juin : Anquetil tout
seul. L’idole de son enfance, auquel il s’identifiait. Et dont il devait
bien constater, les années passant, qu’il ne possédait aucun des talents. (Paul Fournel et moi sommes faits pour nous entendre. Quand j'étais gamin, je voulais être Gaston Roelants.) A
l’époque, la France était divisée en deux. On était pour Anquetil ou pour
Poulidor. Les duels se terminaient presque toujours par la victoire d’Anquetil
mais, s’ils s’étaient retrouvés au deuxième tour d’une élection présidentielle
(François Hollande est investi aujourd’hui même), Poulidor l’aurait emporté haut
la main. Sans obtenir cependant la voix de Paul Fournel, attaché à son héros
jusqu’à en faire le portrait en partie imaginaire. Le personnage se construit
autant par ses exploits et ses déclarations que par ce qu’il représentait pour
un enfant tel que le considère maintenant Paul Fournel, lui-même, enfin adulte.
Dans la rue, il pleut et les bus affichent la
couverture du dernier roman de Marc Levy. Dans le métro, on est au sec et les
passagers lisent Karl Marx ou Aimé Césaire. Quand ils ne sont pas, bien sûr,
accrochés à leur iPhone. Même Paris change. Sans abandonner tout à fait le
livre. J'ouvre Peste & choléra,
de Patrick Deville, publié au Seuil le… 23 août prochain. Télescopage d’un
printemps pourri et d’une fin d’été prometteuse.
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