Claude
Francueil publie en première page de Gil Blas un long reportage sur « Un
scrutin épique » au terme duquel, après onze tours, Marc Elder a reçu le
Prix Goncourt pour Le Peuple de la mer. Avant de voter, il fallait manger – on
fait les choses dans l’ordre inverse aujourd’hui. Autre différence : après
les délibérations, les votes de chaque tour étaient révélés aux journalistes.
Ce jour-là, rien ne semblait devoir se décider. Léon Werth (La maison blanche) ralliait cependant
de plus en plus de suffrages : trois voix au troisième tour, quatre au
quatrième, puis il en reste là et Alain-Fournier (Le grand Meaulnes) fait son apparition avec trois
voix au cinquième tour et quatre au sixième. Le Prix Goncourt ne peut se jouer
qu’entre les deux.
Septième, huitième, neuvième, dixième tours, le jury ne
parvient pas à dégager une majorité et Lucien Descaves propose Marc
Elder – gravement malade, est-ce une qualité littéraire ? Le onzième tour
lui apporte six voix, la majorité et le Prix Goncourt. Gustave Geoffroy, le
président, n’a même pas eu à user de la prérogative de son poste qui lui donne
deux voix si nécessaire. L’ouvrage primé est « un livre de grand
mérite », mais qui n’a pas convaincu la postérité.
Quant à Marcel Proust,
parce qu’il faut bien une raison à raconter tout cela, il en a été brièvement
question, ainsi que le rapporte brièvement Claude Francueuil : « M. Paul Margueritte nous confie qu’au cours de la
discussion, M. J.-H. Rosny aîné signala un livre de grande valeur, Du
côté de chez Swann, dont l’auteur, M. Marcel Proust, n’avait pas fait acte
de candidat. »
Notons aussi que le Times Literary Supplement daté du même 4 décembre publie un long article de Mary Duclaux consacré à Du côté de chez Swann. Proust a commencé sa conquête non seulement de la France mais de l'Europe cultivée...
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