Il en reste, forcément, de moins en moins, des survivants d'Auschwitz. Heureusement, leur disparition a, pour certains d'entre eux, été précédée de livres qui, eux, restent. Un de ces survivants, Joseph Bialot, vient de mourir - je l'apprends par un tweet de Pocket, où il avait été publié. Il avait 89 ans et était donc passé par Auschwitz, qui n'est cependant pas le thème principal de ses livres, pour la plupart des romans noirs. En voici, brièvement, deux.
La ménagerie (2007)
Joseph Bialot écrit serré. Les mots se suivent
comme les balles d’une rafale. Et font des dégâts. Les policiers portent des
totems comme des scouts. Des animaux violents, à l’image du héros, Rottweiler –
son vrai nom – surnommé « le chien ». Une ménagerie en pagaille
depuis que « Loup », l’ancien patron de l’équipe, a été assassiné. Les
lecteurs de Bialot le connaissaient déjà. A partir de là, une enquête aux
pistes brouillées. Un passé flou dont il faut préciser l’image. Et, pour tenir
le coup, quantité de CRS : citron, rhum, sucre. Les catastrophes succèdent
aux catastrophes. Le rythme tient en haleine. Un bon polar où toutes les
ficelles du genre sont présentes, masquées par mieux que du savoir-faire.
186 marches vers les nuages (2009)
Dans les années trente, Bert Waldeck avait refusé l’ordre nazi. C’était mal vu pour un flic allemand dont la femme, de surcroît, était juive. Quand il revient chez lui, à Berlin, en 1945, il a atteint l’âge indéfinissable de tous ceux qui ont connu les camps de la mort et y ont survécu après avoir perdu toute confiance dans l’humanité. L’état de la ville n’a rien pour le réconforter. Il marche « dans cette ville-silhouette, entièrement faite de squelettes de pierre, dans cet ossuaire en plein air de maisons brisées, dans ces catacombes bourrées de cadavres, dans les tunnels du métro saccagés, dans les nécropoles comblées par les obus, dans les égouts et les caves, entre les hommes morts et les rats vivants, je suis une exception.»
Au milieu des ruines, il est chargé par les Américains de les aider à retrouver un homme. Sa propre enquête est bridée par un supérieur dont il se méfie. D’autant qu’il ignore le but réel de la mission à laquelle il participe. C’est par hasard qu’il entend parler de l’opération Paperclip. Joseph Bialot, dont le roman est d’un grand réalisme, puise avec Paperclip dans les faits historiques : les Etats-Unis cherchaient en secret à recruter les meilleurs scientifiques allemands, Werner von Braun et les autres, quoi qu’ils aient fait pendant le conflit. Avec les services soviétiques sur le coup aussi, Bert Waldeck réalise qu’il est un pion sans importance sur l’échiquier de l’après-guerre qui s’installe. G.I. d’occasion, l’ancien policier ne pense qu’à laisser tomber ceux qui l’emploient et à retrouver un peu de pureté auprès de Maria, dont la profession fait presque une sainte : « Les putains, en 1946, sont les derniers vivants respectables dans cet univers. »
Désenchanté, mais pas tout à fait désespéré : la reconstruction va commencer.
186 marches vers les nuages (2009)
Dans les années trente, Bert Waldeck avait refusé l’ordre nazi. C’était mal vu pour un flic allemand dont la femme, de surcroît, était juive. Quand il revient chez lui, à Berlin, en 1945, il a atteint l’âge indéfinissable de tous ceux qui ont connu les camps de la mort et y ont survécu après avoir perdu toute confiance dans l’humanité. L’état de la ville n’a rien pour le réconforter. Il marche « dans cette ville-silhouette, entièrement faite de squelettes de pierre, dans cet ossuaire en plein air de maisons brisées, dans ces catacombes bourrées de cadavres, dans les tunnels du métro saccagés, dans les nécropoles comblées par les obus, dans les égouts et les caves, entre les hommes morts et les rats vivants, je suis une exception.»
Au milieu des ruines, il est chargé par les Américains de les aider à retrouver un homme. Sa propre enquête est bridée par un supérieur dont il se méfie. D’autant qu’il ignore le but réel de la mission à laquelle il participe. C’est par hasard qu’il entend parler de l’opération Paperclip. Joseph Bialot, dont le roman est d’un grand réalisme, puise avec Paperclip dans les faits historiques : les Etats-Unis cherchaient en secret à recruter les meilleurs scientifiques allemands, Werner von Braun et les autres, quoi qu’ils aient fait pendant le conflit. Avec les services soviétiques sur le coup aussi, Bert Waldeck réalise qu’il est un pion sans importance sur l’échiquier de l’après-guerre qui s’installe. G.I. d’occasion, l’ancien policier ne pense qu’à laisser tomber ceux qui l’emploient et à retrouver un peu de pureté auprès de Maria, dont la profession fait presque une sainte : « Les putains, en 1946, sont les derniers vivants respectables dans cet univers. »
Désenchanté, mais pas tout à fait désespéré : la reconstruction va commencer.
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