vendredi 16 novembre 2012

Une dernière gorgée de Dicker (pour l'instant)


De 7 à 77 ans, ou presque, tout le monde aime Joël Dicker et son deuxième roman, La vérité sur l’affaire Harry Quebert. Les académiciens de l’Académie française, proches de l’âge au-delà duquel la lecture de Tintin provoque des réactions incontrôlées, lui avaient donné leur Grand prix du roman il y a moins d’un mois. Hier, les jeunes jurés du Goncourt des Lycéens ont fait pareil. La manière de montrer son inclination avant la délibération est cependant empreinte des comportements de chaque génération. Quai Conti, Marc Fumaroli, 80 ans depuis juin, avait le premier publié un article élogieux dans Le Figaro. Côté lycéens, et surtout lycéennes, c’est un soutien-gorge lancé sur scène lors d’une rencontre avec Joël Dicker qui avait pesé pour plusieurs voix. Mais on ne connaît ni l’âge de la propriétaire, ni la taille du bonnet. (Nous avons posé la question à Joël Dicker, au cas où il aurait récupéré la pièce de lingerie pour un début de sa collection d’écrivain rock star, mais sans espoir de réponse. Il n’a pas le temps, il continue la collecte.)
La vérité sur l’affaire Harry Quebert, pour les distraits qui seraient passés à côté des articles que j'ai déjà consacré au roman, est un thriller littéraire. Avec toutes les qualités du thriller, qui poussent à tourner les pages jusqu’au bout avec l’envie féroce de savoir si Harry Quebert, écrivain, a oui ou non tué cette gamine dont il était amoureux trente-trois ans avant, quand elle a disparu, et dont on vient de retrouver le cadavre enterré dans sa propriété. Avec aussi, pour la littérature, les leçons d’un écrivain à un autre, puisque Marcus Goldman, en panne devant son projet de deuxième roman, est venu chercher conseil auprès de son mentor, Harry. Au moment où éclate la fameuse affaire…
On a, dans certains milieux parisiens et chagrins, dit beaucoup de mal de ce livre qui serait écrit comme un roman de plage, semblerait traduit de l’américain et ne représenterait en rien l’esprit français (on voulait probablement dire : parisien). Peu importe. Les lecteurs ont déjà emboîté le pas des académiciens français, ils suivront aussi les lycéens. Parce que l’intelligence réconciliée avec le plaisir, c’est assez rare pour ne pas faire le coup de l’arrogance méprisante.


P.S. Ecrit pour Le Soir hier après-midi, et non paru en raison du manque de place dans les pages culturelles du quotidien, cet article sorti par la porte revient par la fenêtre. Certains romanciers disent bien qu'ils sont conduits par leurs personnages. Moi, c'est par mes articles...

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