samedi 22 février 2014

Pandore, la ville de Nadine Monfils où tout est possible

Une trentaine d’années après Laura Colombe, le recueil de contes érotiques et cruels qui l’avait fait connaître au public belge, Nadine Monfils n’a rien perdu de sa fantaisie. Elle a, dans le même temps, accru sans cesse le nombre de ses lecteurs. Si bien qu’elle occupe aujourd’hui, sur le terrain d’un polar imprégné de sa singulière poésie, une place majeure pour les amateurs d’un imaginaire libéré de toutes contraintes. Comme elle a en outre beaucoup publié, ses livres arrivent en rafale chez les libraires et à la Foire duLivre, des rééditions accompagnant une nouveauté.
Son éditeur a remis en selle le commissaire Léon, héros de dix romans (et d’un film, Madame Edouard) resservis en cinq volumes en cours de réédition. A Montmartre, son port d’attache, ou à Rome, il tire les fils d’enquêtes improbables tout en nouant ceux des lainages qu’il tricote pour son chien homosexuel, Babelutte.
En poche l'an dernier, La petite fêlée aux allumettes rappelait que Pandore n’est pas une ville de tout repos. Cela se confirme dans La vieille qui voulait tuer le bon dieu (en poche cette année) que Nadine Monfils y a situé. Les premières lignes plantaient, sinon le décor, le thermomètre à une altitude élevée : « Ce jour-là, le soleil avait dénoué son écharpe et inondait Pandore de ses rayons dorés. L’après-midi touchait à sa fin et il faisait une chaleur à cuire un œuf sur le dos d’un pitbull. »
On n’a pas fini de chauffer, en particulier Ginette, femme de ménage dans une entreprise de pompes funèbres, épouse fidèle de Marcel qui l’attend chaque jour à la maison, confiant dans sa ponctualité. Ce jour-là, Ginette, qui n’est pas exempte de coquetterie (bien qu’elle s’appelle Plouf) et qui rêvait du destin de Lady Di, s’est offert une paire de chaussures jaunes. Magnifiques. Eblouissantes. Et ancienne propriété de Lady Di, lui a dit le vendeur. Il n’en fallait pas plus pour se laisser convaincre, craquer deux cents euros détournés du compte commun, et repartir guillerette mais en retard. Un homme la suit, lui parle en poète (à deux balles), la séduit, la saute sur le capot d’une Mercedes et disparaît. Ginette a perdu une chaussure et gagné une rare allégresse. Quelle belle journée ! Gâchée au retour, cependant : Marcel, son Marcel qui s’empiffrait de bières et de pizzas, a été assassiné…
C’est le début d’une intrigue foutraque que Nadine Monfils tire dans tous les sens où son imagination la mène – et elle a l’imagination débordante. Elle est considérablement aidée dans son entreprise par Mémé Cornemuse, devenue un des personnages récurrents les plus impressionnants de la série de polars en cours. Concierge dans l’immeuble où habite Ginette, Mémé Cornemuse ne jure que par Jean-Claude Van Damme, ne se détend qu’en matant des films pornos et ne fait de projets qu’illégaux. Le dernier en date, qui justifie son poste de concierge, consiste à faire percer par un complice un tunnel menant tout droit à la bijouterie voisine. L’affaire était bien engagée mais voici qu’arrive dans le quartier, hébergée dans un couvent, « Micheline Martini, complice de son mari pédophile qui avait laissé mourir des gamines de faim dans sa cave ». Ce n’est plus la place d’une bijouterie haut de gamme. Déménagement, fin du beau projet de Mémé Cornemuse. Et rebondissements en pagaille.
A suivre, d'ailleurs, dans un nouvel épisode des aventures de Mémé Cornemuse, Mémé goes to Hollywood, tout frais paru.

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