Sophie aimerait, parfois, profiter de
moments de solitude. Entre les enfants, le mari, le boulot, elle a l’impression
d’être enchaînée à une vie qui l’entraîne et la traîne à sa suite comme si elle
était (mal) accrochée à un train en marche, qui ne s’arrête jamais. Le pire, c’est
que Loïc, le mari, gentil mais chiant malgré lui, ne comprend pas vraiment de
quoi elle a besoin : une fuite vers Punta Cana (ou ailleurs mais, allez
savoir pourquoi, c’est Punta Cana qui lui vient à l’esprit). Loïc, c’est la
réalité des besoins immédiats, l’élastique qui ramène sans cesse Sophie vers la
vraie vie, avec son insupportable routine quotidienne, sans grandes variations
ni surprises.
Quand est-ce qu’il casse, l’élastique ?
Tout de suite, si elle veut : il suffit de le décider,
au fond. Une petite fugue n’a jamais de mal à personne, ni à celle qui part s’oxygéner
le cerveau, ni à ceux qui restent et qui prendront, avec un peu de chance,
conscience de son rôle indispensable, de leurs exigences devenues si
habituelles qu’elles semblent normales. L’engrenage qui broie les uns et les
autres pour les faire entrer dans le moule des clichés…
Sophie, plutôt que d’attendre un hypothétique vol vers la
République dominicaine, choisit le train et une destination pas trop lointaine :
Saint-Malo (comme tout le monde en ce week-end de Pentecôte, enfin, tout le
monde, au moins les acteurs et les visiteurs d’Etonnants Voyageurs, ce qui fait
déjà foule).
A la maison, où elle a laissé les siens, c’est un peu,
beaucoup, la panique. Loïc, persuadé de tout savoir de Sophie – les hommes ont
toujours raison –, prétend que ce n’est pas son genre d’agir ainsi. Il le sait
mieux que personne, mieux que Sophie elle-même. Ils sont parfois énervants, les
mecs, quand même ! Ceci dit, les autres témoins de la vie de Sophie ne
sont pas, à de rares exceptions près, beaucoup plus perspicaces.
Alors, voilà : Sophie respire enfin. Si bien qu’elle se
demande si elle ne pas prolonger son escapade prévue pour quelques heures
seulement. Avec quelles conséquences pour son couple, sa famille, son boulot ?
C’est la question à choix multiples. Mais, pour avoir la réponse, il faudra
suivre la logique d’une évolution rapide qui sera peut-être une révolution.
On n’oubliera pas, malgré tout, qu’une révolution complète
est un tour sur soi-même, avec retour au point de départ.
Ou presque.
C'est Juste un peu de temps, de Caroline Boudet.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire