dimanche 23 novembre 2014

Le service de presse numérique

Vincianne d'Anna m'a interrogé, il y a quelques jours, à propos des livres que je recevais en service de presse numérique. Elle a intérrogé d'autres personnes: côté journalistes, Michel Dufranne, qui avait parlé du sujet dans une émission, Lucie Cauwe, Gabriel Lucas; côté éditeurs, diverses maisons de Belgique francophone. A l'arrivée, un article paru sur le site Lettres numériques, Les services de presse en format digital, pour ou contre?, repris par ActuaLitté sous un titre différent: Proposer ses ouvrages aux journalistes: le service de presse numérique.Comme on ne se refait pas, j'avais répondu aux questions posées sous la forme d'un texte trop long pour être utilisé dans son intégralité. Mais il me permettait de faire le point avec moi-même sur ce sujet. Voici donc ce que j'avais à dire à ce propos.

Je me définis d’abord comme un lecteur, s’il est pertinent de se définir par l’activité qui vous passionne le plus et vous occupe une majorité du temps. Ma boulimie est sans limites et, partant, je ne me suis jamais senti freiné par aucun support. Les textes sont là où je les trouve, et cela peut être, ou avoir été, dans des éditions correctes comme dans les plus moches, sur du papier bouffant agréable au toucher et au regard comme sur le papier rongé d’acide, friable et bruni de vieux livres de poche. L’écran, les écrans ne sont jamais, dans l’absolu, qu’un support de plus, sur lequel un nombre croissant d’ouvrages sont disponibles.
Au point de départ, je me contentais d’un PC de bureau et d’un ordinateur portable, et les fichiers étaient généralement au format PDF. Par rapport au papier, cette configuration présentait déjà plusieurs avantages.
D’abord, le délai très bref entre l’apparition d’un besoin de lecture et l’affichage du texte sur l’écran. Qu’il s’agisse d’une nouveauté qu’il apparaît nécessaire de traiter rapidement dans un article ou d’un ouvrage libre de droits, le chemin semble raccourci entre l’émetteur et le récepteur. Si l’attaché(e) de presse est dans son bureau et qu’il/elle répond rapidement à une demande de service de presse, le fichier du livre arrive quelques minutes plus tard en réponse au courriel que j’ai envoyé. S’il s’agit d’un ouvrage du domaine public, il a toutes les chances d’être disponible dans l’une ou l’autre bibliothèque en ligne et il ne faut que le temps d’une recherche et celui du chargement.
Ensuite, la simplicité de la recherche dans le texte pour autant qu’il ne s’agisse pas d’un fichier en image pure (et encore, les outils d’OCR existent pour améliorer l’accès). On a beau prendre des notes au cours de la lecture d’un ouvrage papier, il arrive toujours qu’on n’ait pas écrit quelque part le numéro de page où l’auteur parlait de Kafka et, zut !, c’est précisément une citation qui aurait été la bienvenue à ce point de la rédaction de l’article ! Je n’ai pas besoin d’expliquer à quel point il est plus aisé de rechercher le mot « Kafka » dans un fichier que de le retrouver en feuilletant un livre qui peut être assez épais…
Enfin, et en passant à ce troisième point je fais un saut dans le temps, l’arrivée puis la généralisation du format ePub a rendu la lecture physiquement plus agréable en permettant aussi la diversification des supports et la simplification des déplacements. Mon premier achat de liseuse, il y a deux ans et demi, a considérablement accru mon confort de lecture, chez moi ou à l’extérieur. Actuellement, je lis essentiellement sur tablette à la maison (mais parfois encore sur ordinateur) et sur smartphone quand je suis ailleurs, passant parfois, en fonction des circonstances, de l’un à l’autre en cours de lecture d’un même livre.
Les éditeurs ont, dans leur grande majorité, compris leur intérêt à envoyer des fichiers plutôt que des livres papier. De leur point de vue (si j’essaie de me mettre à leur place), non seulement l’ouvrage est plus vite et plus sûrement rendu à destination (des livres sont égarés par les services postaux) mais aussi le coût de l’opération est quasiment nul, ce qui n’est pas le cas avec un livre papier qui a un prix de revient auquel il faut ajouter les frais d’expédition et le temps passé à le mettre dans une enveloppe, à rédiger l’adresse, etc.
Néanmoins, je note quelques réticences, essentiellement provoquées par la peur du piratage.
Dans les cas les moins aigus, je reçois des fichiers protégés de différentes manières, ce qui n’est pas très grave pour le format ePub pourvu qu’il soit possible de le copier sur les différents supports que j’utilise mais peut être plus gênant avec le format PDF quand il interdit le recadrage ou l’introduction de métadonnées, alors que j’ai besoin de réduire des marges parfois considérables et d’utiliser une signalétique interne pouvant être reconnue par mes appareils. Heureusement, il existe des outils pour ôter ces protections…
Dans les cas les plus aigus, mais ils sont peu nombreux, certains services de presse n’ont pas l’autorisation, dans leur maison, d’envoyer des fichiers. J’explique patiemment que les fichiers ne sortiront pas de chez moi et, petit à petit, l’idée fait son chemin même chez les plus réfractaires.
Si je considère la situation actuelle par rapport à ce qu’elle était il y a cinq ans, je dirais que je lisais à l’époque moins d’un livre sur dix à partir d’un fichier numérique. Tandis qu’à présent, j’en lis beaucoup moins d’un sur dix sur papier. Et, à l’intérieur des services presse numériques, la proportion du format ePub croît, doucement mais sûrement.
La tendance me semble irréversible, en particulier dans mon cas puisque, de Paris, source principale des envois, à Madagascar, lieu de leur arrivée, les communications physiques sont longues et parfois difficiles.
Faut-il ajouter que je m’en réjouis ?

1 commentaire:

  1. Une bonne approche de la question, sous tous ses angles, aspects positifs, aspects qui le sont moins.
    En France, il me semble, selon mon expérience (environ 20 livres par semaine, ce qui rend le problème stockage crucial) que les pertes imputables à la Poste sont bien plus faibles.
    Pour ma part, ne pouvant évidemment garder qu'une part infime des livres reçus et me refusant absolument à en faire commerce, j'ai passé un accord avec une bibliothèque municipale à Paris, la Bibliothèque Marguerite Audoux, qui a pu ainsi créer un beau fonds "Poezibao" et rendre ainsi la poésie plus accessible aux lecteurs parisiens.

    RépondreSupprimer