L'édition originale de Journal d'un écrivain en pyjama ne portait pas de la mention : « de
l’Académie française » que cette parution au format de poche a eu largement le temps d'intégrer à la couverture et à la page de titre. Il
n’est, heureusement, pas besoin de cela pour goûter la manière dont Dany
Laferrière propose, entre humour et sérieux, insolence et pertinence, le récit
de sa vie d’écrivain. Une vie « à
lire et à écrire. Cela a-t-il un sens ? Je ne le sais. » S’il n’a
pas la réponse à la question, nous pouvons la lui souffler : oui, bien
sûr, le sens que donne chaque lecteur à des textes vibrant de, précisément,
leur quête de sens.
Sous forme de notes assez
brèves, chacune consacrée à un pan (ou à un détail) de son métier d’écrivain,
l’auteur fournit des conseils, parfois contradictoires, à l’usage de celles et
ceux qui aimeraient faire comme lui. Et bénéficier des avantages de la
situation : « quand on a écrit quelques
livres qui ont eu l’heur de plaire à un certain nombre de gens, on vous invite
à voyager pour jouer à l’écrivain. Je me souviens encore de cette première fois
où on m’avait invité en Belgique aux frais de la princesse. Rien à payer ?
Non, monsieur, ni vos billets, ni vos taxis, ni votre chambre d’hôtel, ni vos repas. »
Elle n’est pas belle, la vie d’écrivain ? En pyjama ou en uniforme
d’académicien…
Certes, il est agréable
de voyager à l’œil, encore faut-il avoir prouvé deux ou trois choses par les
livres publiés. Et, donc, avoir sué sur des manuscrits, surtout quand il s’agit
de s’acharner sur une vieille Remington achetée chez un brocanteur. C’est avec
cette machine que Dany Laferrière a écrit son premier livre, Comment faire l’amour avec un nègre sans se
fatiguer, et beaucoup de ceux qui suivirent. Il ne savait rien de ce qui
l’attendait : « je me suis
assis devant la machine pour écrire ma première phrase. J’ai attendu la suite
tout l’après-midi. […] J’ai passé l’été à écrire avec un seul doigt tout en me
nourrissant de fruits et de légumes. J’étais devenu un véritable athlète de
l’écriture. »
D’une certaine manière,
ces notes sont celles que l’écrivain aurait aimé lire avant de commencer.
Récapitulation d’une expérience, elles sont destinées à faire gagner du temps
aux apprentis écrivains. Pas à passer moins de temps sur leur travail : il
ne cesse de dire qu’il faut non seulement écrire mais aussi corriger et
réécrire, et passer des jours, des mois, à lire, nécessaire confrontation avec
les autres. Et même, premier de 182 conseils lapidaires (un à la fin de chaque
note) : « Une journée par mois,
sans lire ni écrire, pour garder un pied dans la réalité, ce qui vous permettra
d’avancer d’un pas dans le rêve. »
Après cela seulement, peut-être aura-t-on droit
aux voyages et aux hôtels gratuits.
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