L'appellation n'est pas de moi mais de... l'incontournable Livres Hebdo qui, comme chaque année, présentant la rentrée littéraire, élit une poignée d'ouvrages dont on sait déjà qu'ils vont beaucoup faire parler d'eux. Une manière de liquider la question, dans le meilleur des cas - ou, dans le pire, une manière d'étouffer tout de suite les ambitions des autres. Mais non, heureusement, ça ne fonctionne pas ainsi et il reste des semaines de lecture avant les premières parutions - un mois et demi, très exactement. Cela laisse le temps de découvrir d'autres choses.
En parallèle, Lire a aussi fait ses choix. Le magazine qui fut d'abord dirigé par Bernard Pivot propose les extraits de quinze ouvrages de la rentrée. Le même nombre que Livres Hebdo, mais bien sûr pas dans le même esprit: la publication du Cercle de la Librairie s'adresse surtout aux professionnels tandis que Lire vise un public plus large d'amateurs et de curieux.
Cela n'empêche pas certains recoupements.
Dans le domaine français, les deux magazines ont retenu, personne ne songera à s'en étonner, le 27e roman d'Amélie Nothomb affublé d'un titre qui laisse entendre qu'elle peut vraiment tout se permettre: Les prénoms épicènes (Albin Michel). Il est vrai qu'elle avait déjà soumis à l'attention de ses lectrices et lecteurs fidèles (et soumis) Métaphysique des tubes, entre autres. Je ne suis pas fou de ses romans, c'est le moins qu'on puisse dire mais, comme chaque année, je placerai tous mes espoirs dans celui-ci. Au risque d'être déçu.
Autre membre du petit club serré sur le territoire commun aux deux listes, Yasmina Khadra - dont je comprends encore moins le succès et la réputation inentamée malgré une remarquable absence de qualités dans son écriture. Là non plus, bien entendu, je ne préjugerai pas de sa réussite littéraire ou non (le succès commercial ne m'intéresse pas vraiment) sans avoir lu Khalil (Julliard) qui semble, comme la plupart de ses livres précédents, être bâti sur un, la majuscule s'impose, Sujet - Claro disait là-dessus des choses éclairantes dans sa plus récente chronique du Monde.
On n'attendait pas vraiment Jérôme Ferrari en période de rentrée littéraire, puisqu'il a déjà reçu le Goncourt. Voici pourtant, chez son éditeur habituel (Actes Sud), A son image, titre qui rime (par le sens seulement, mais quand même) avec photographie.
Alain Mabanckou revient à Pointe-Noire dans Les cigognes sont immortelles (Seuil), on espère qu'il aura en même temps retrouvé un peu de la flamme qui l'animait il y a quelques années et qui me semble avoir été, au moins en partie, étouffée par une surproduction récente - encore que, de ce côté, ça ne s'arrange pas vraiment puisqu'il publie quelques semaines plus tard un Miro chez RMN-Grand Palais. [Mais Alain Mabanckou s'étonne de cette annonce, et me dit ne pas publier d'ouvrage sur Miro à la rentrée. Dont acte.]
Elle a toute sa place dans la rentrée littéraire à laquelle elle devrait apporter la lumière de son regard d'écrivaine et la puissance d'évocation des gestes précis d'une décoratrice: Maylis de Kerangal va faire beaucoup parler d'elle, s'il y a une justice sur le terrain de la littérature, avec Un monde à portée de main (Verticales). Oui, je l'ai lu. Oui, je l'ai adoré.
Dans le domaine étranger, Lire et Livres Hebdo se rejoignent sur deux noms, c'est-à-dire qu'ils sont d'accord, au total, à peu près pour la moitié de leurs sélections.
Zadie Smith est l'un d'eux, et j'attends beaucoup de Swing Time (Gallimard) qui confirmera, je l'espère, le talent fou de cette écrivaine saluée, à juste titre, depuis Sourires de loup.
L'autre est un peu plus inattendu, bien que D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds ait été très remarqué il y a trois ans (mais je ne l'ai pas lu). L'Islandais Jon Kalman Stefansson propose cette année Asta (Grasset).
15 - 7 = 8 autres ouvrages que les rédactions ont retenus en restant chacune dans son coin.
Pour Livres Hebdo, c'est, dans l'ordre où ils sont présentés:
- Christophe Boltanski. Le guetteur (Stock)
- Philippe Torreton. Jacques à la guerre (Plon)
- Aurélie Filipetti. Les idéaux (Fayard)
- Boualem Sansal. Le train d'Erlingen ou La métamorphose de Dieu (Gallimard)
- Christine Angot. Un tournant de la vie (Flammarion)
- Dan Chaon. Une douce lueur de malveillance (Albin Michel)
- Jeffrey Eugenides. Des raisons de se plaindre (L'Olivier)
- Salman Rushdie. La maison Golden (Actes Sud)
Tandis que Lire a choisi:
- Serge Joncour. Chien-loup (Flammarion)
- Jérémy Fel. Helena (Rivages)
- Emmanuelle Bayamack-Tam. Arcadie (P.O.L.)
- Adrien Bosc. Capitaine (Stock)
- Sophie Divry. Trois fois la fin du monde (Noir sur blanc)
- Anton Beraber. La grande idée (Gallimard)
- Nicole Krauss. Forêt obscure (L'Olivier)
- Javier Cercas. Le monarque des ombres (Actes Sud)
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