C'est une page ouverte dans mon navigateur depuis le 17, il y aura cinq jours cet après-midi. Elle m'a énervé, je me suis demandé si j'allais me calmer en la revoyant de temps en temps. Au contraire. Puisqu'il faut que je m'en débarrasse, allons-y. De quoi s'agit-il? D'un entretien avec Patrick Poivre d'Arvor, mieux connu sous le nom de PPDA, et qu'on ne confondra plus avec son double de latex, PPD, puisque celui-ci est mort des œuvres de Canal+. PPDA, lui, est bien vivant, la preuve, il se confie au Point qui titre d'une citation: "Un homme politique se doit d'avoir écrit au moins un livre."
En gros, si on parle d'homme politique français, difficile de contester. Ailleurs, même Donald Trump a écrit un livre, ou au moins l'a signé. Passons, ce n'est pas le sujet qui m'irrite. Et qu'en a-t-on à faire des affirmations qui ne suscitent pas la controverse? Rien. A moins qu'il en naisse de l'admiration - c'est une autre histoire. Ici, déclaration de bon sens qui dénote l'observation même pas aiguë des carrières françaises menant au pouvoir ou dans son antichambre, voire même dans l'arrière-cour de l'opposition.
Florent Baracco, qui interroge PPDA, commence par lui demander ce qu'il lit en ce moment. La réponse n'est pas très importante, c'est un livre de Vanessa Schneider à paraître à la rentrée - comme tous les chroniqueurs, PPDA a déjà un œil, mais peut-être pas les deux, dans la rentrée. Même Claro l'explique, et son cas est pourtant assez différent.
Là où PPDA touche au sublime, c'est quand il explique comment il lit. Attention, ça pique.
Je lis plutôt un livre à la fois, mais je lis affreusement vite. Je dis «affreusement», car je reçois beaucoup d'ouvrages que je dois lire pour pouvoir les chroniquer ou interroger leur auteur. Ma lecture est au laser, il faut que ça usine!
Affreux, l'usine! Voilà donc les Temps modernes, mon pauvre monsieur!
Franchement, de quoi se plaint-il? Est-ce un moyen sournois de préparer le terrain à une demande de surclassement dans l'échelle de pénibilité du travail? Critique littéraire: +3 (je dis ça sans savoir, j'ignore comment on compte, si c'est en degrés Celsius ou Fahrenheit). C'est dit apparemment sans rire et vraisemblablement sans honte.
Si lire te pèse, mon bonhomme (en chair et os, pas en latex), change de boulot! Bricole ou même va à la pêche. Les mots te laisseront tranquille et pas un auteur ne viendra taquiner le menu fretin avec toi.
Je me demande toujours ce qui leur prend, à ces forçats de la lecture, quand ils s'épanchent ainsi sur la masse infinie de leur travail, et l'heure qui tourne, et zut! il me reste encore deux cents pages et j'entre en studio dans une demi-heure - ce qui, dans le cas qui nous concerne en ce beau jour d'aujourd'hui, devrait suffire pour feuilleter encore cinq romans de la rentrée, si j'en juge d'après mes souvenirs d'une émission, j'ai oublié laquelle, dont les dernières minutes étaient consacrées à présenter, de manière critique, oui, oui, dire que c'est bien, que c'est attachant, que c'est émouvant, que c'est superbement écrit, c'est aussi une critique, une pile de livres haute comme moi et dont l'odeur d'encre fraîche avait dû l'enivrer.
Rendez-nous le flacon, on s'occupera de l'ivresse plus tard, quand on aura goûté au plaisir de lire, une notion qui semble étrangère à ce grand professionnel.
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