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jeudi 3 décembre 2020

Irène Frain, Prix Interallié


Irène Frain, autrice protéiforme, est surtout connue pour des romans pleins d’aventures, souvent inspirés de parcours biographiques qu’un ancrage breton, avec une origine commune à de nombreux grands voyageurs, l’autorise à aller chercher un peu partout sur la planète – avec une prédilection pour l’Orient.

On sait peut-être moins que, côté littérature, elle place très haut l’œuvre de Julien Gracq et que, côté société, la cause des femmes lui est chère. Son nouveau livre penche de ces deux côtés : une écriture d’une élégance très tenue et un personnage féminin dont la mort a été laissée dans l’ombre. Un crime sans importance est un récit, affiché comme tel, où une mort tragique pose avec urgence des questions auxquelles toutes les réponses ne sont pas données. En visitant les creux des silences, elle fait entendre une voix qui porte loin.

C’est un fait divers comme on en rencontre trop souvent, qui met en scène un agresseur inconnu et sa victime de 79 ans, et qui remue d’autant plus les proches que l’affaire n’est pas résolue. Irène Frain pose les données : « Les faits. Le peu qu’on en a su pendant des mois. Ce qu’on a cru savoir. Les rumeurs, les récits. » Description des lieux, lumière limpide, hésitations, déjà, sur quelques détails qui n’en sont peut-être pas. Car la narratrice embarquée bien malgré elle dans une enquête pour laquelle elle n’est pas formée commence celle-ci après les semaines du coma dont la victime n’est pas sortie, après l’enterrement auquel assistait, avec son compagnon, une femme en manteau bleu-noir. Elle a échangé quelques mots avec les enfants de la défunte.

« Comment l’auteur de ces lignes est-il au fait de cette information ? C’est très simple. Je suis la femme en manteau bleu-noir. Et la victime de l’impasse, c’est ma sœur. »

Outre qu’elle était son aînée et sa marraine, Denise a joué un rôle essentiel dans la vie d’Irène. Qui a pourtant été, de tous les membres de la famille, la dernière informée, par un simple faire-part à la veille des obsèques – alors que l’agression s’était produite, sans qu’elle en sache rien, sept semaines auparavant. La faute peut-être à la distance qui s’était installée entre les deux sœurs qui ne s’étaient pas vues depuis des années. La faute peut-être à la maladie de Denise, et on peut remonter ainsi, de causes en effets, le temps des effets pervers qui ont conduit à cet éloignement. Il dure après les obsèques puisque, au contraire de ce qu’ils avaient annoncé, les enfants de Denise ne donnent plus signe de vie.

Les histoires de famille sont, ainsi, pleines de secrets douteux dont on ne sait pas toujours très bien comment ils se sont trouvés enfermés dans les mémoires avec interdiction d’en sortir. Irène prend des notes, remplit des carnets, le présent appelle le passé, les nœuds ne se défont pas et, même, se resserrent : « j’ai voulu tenir la chronique du silence. Mais au fil des mois, un autre propos, beaucoup plus conscient, a pris le pas sur le premier. Il a commencé à se dessiner le jour où j’ai découvert que la police et la justice m’opposaient le même mutisme que ma famille. L’accablement, à ce moment-là, a fait place à la colère. »

Cette colère sous-tend le texte, comme l’effroi de la disparition inexpliquée. Il reste des trous dans l’histoire, que « la petite ravaudeuse du passé », comme elle se décrit dans un poème final, tente de combler. Avec le talent nécessaire pour dire les sentiments contradictoires qui l’animent.

jeudi 24 octobre 2019

Arrêtez de l'appeler l'Intergrasset

Le Prix Interallié fut, autrefois, une chasse quasiment gardée des Editions Grasset. Un auteur de cette maison avait-il été cité parmi les favoris des prix d'automne, et frustré de n'en obtenir aucun? Il pouvait compter sur l'Interallié pour rattraper le coup. Il y a eu des séries spectaculaires d'années consécutives où un candidat malheureux publié chez Grasset empêchait tout autre écrivain (rarement écrivaine) d'avoir la moindre chance à l'Interallié.
Cette année, si cela fonctionnait encore de la même manière, cela aurait pu être la bouée de secours pour Yann Moix. Mais la ficelle eût été trop grosse, et la bouée est resté à bord où l'on n'entend plus de la même oreille les cris désespérés de l'homme à la mer(de).
Pas un auteur Grasset, donc, dans la dernière sélection. Mais le beau nom de Sylvain Prudhomme, au cas où... Et quelques autres, bien sûr, dans le cas contraire. Ce sera le 13 novembre, une date qu'on aimerait ne plus voir au calendrier (comme certains numéros de dossard ne sont plus attribués dans des courses cyclistes endeuillées par la mort d'un coureur). Mais le calendrier s'en fout (au contraire de nous).

  • "Les minets", François Armanet (Stock)
  • "L'île du dernier homme", Bruno de Cessole (Albin Michel)
  • "Où vont les fils ?", Olivier Frébourg (Mercure de France)
  • "Par les routes", Sylvain Prudhomme (Gallimard)
  • "Le cœur battant du monde", Sébastien Spitzer (Albin Michel)
  • "Les choses humaines", Karine Tuil (Gallimard)



mercredi 14 novembre 2018

Prix Interallié : Thomas B. Reverdy

Il y a longtemps que Thomas B. Reverdy "tournait" autour d'un des grands prix traditionnels d'automne. Il n'a plus à attendre: le Prix Interallié vient de choisir son roman L'hiver du mécontentement.
Shakespeare l’a écrit dans Richard III : « Voici l’hiver de notre mécontentement », premiers mots du principal protagoniste de la pièce et que prononce, en V.O., Candice dans la version de la compagnie à laquelle elle appartient – que des filles ! L’hiver du mécontentement, citation à peine détournée, est le titre du nouveau roman de Thomas B. Reverdy et l’appellation donnée par le Sun à l’hiver 1978-1979, quand les grèves paralysaient la Grande-Bretagne.
Candice, dans les rues de Londres, n’est pas sur scène, et ce n’est pas encore l’hiver. Elle roule à toute allure sur son vélo de coursier et la description a tout d’un rêve que chacun aimerait faire. Elle est souveraine, maîtrise les gestes et le parcours, traverse la ville comme un décor construit dans le seul but de placer la cycliste dans la lumière d’un de ces projecteurs que l’on nomme poursuite…
Sa légèreté doublée par son travail de comédienne contraste avec la situation d’un pays qui a peur de tout, preuve de sa faiblesse : « L’Angleterre est une petite vieille qui n’a plus la force de rien. L’Angleterre est sur le déclin. » Heureusement (?), un personnage ne va pas tarder, dans la réalité et dans le roman, à manifester son ambition – et l’ambition de redresser la nation, on y vient.
Le théâtre est-il le miroir dans lequel s’observe la société ? Richard, écarté du pouvoir, veut le conquérir à tout prix. La salle où la compagnie répète est, un jour, réservée à la Royal Shakespeare Company qui débarque avec deux femmes, « dont une plus âgée, en tailleur très chic. » En saluant les filles qui sortent pour aller dans un café, elle « a dit en souriant qu’elle aussi, à sa manière, elle s’attaquait à Richard III. » Fille d’épicier, elle prend des cours de diction avec les comédiens de « la Royal ». Elle est chef du Parti conservateur, elle veut le pouvoir. Elle s’appelle Margaret Thatcher.
Jones, musicien, se désolera de voir le public, à la première de Richard III, applaudir la femme politique quand elle s’installera au balcon en compagnie de son mari : « C’est toujours un peu décevant de voir que les lettrés sont aussi grégaires que les autres. Qu’ils ont, autant que les autres, peur du pouvoir à ce point. » Mais Jones est un inadapté : « Si vous croyez en l’art, si vous savez lire, si vous aimez la musique, vous êtes foutu. Plus rien ne vous fait peur ni ne vous impressionne. On ne vous la fait plus. Et l’illusion s’effondre, comme dans un roman de science-fiction. Le rideau s’ouvre. »
Le goût du pouvoir est  donc sur scène et son envers, dans la salle. La peur du pouvoir passera bientôt dans la rue, sous la forme d’une lutte inégale que Thomas B. Reverdy résume, vers la fin du roman, en un abécédaire qui fournit le programme de Margaret Thatcher. A la dernière lettre, « Z comme Zero », le nombre d’emplois créés par la politique de la Première ministre, une citation d’un de ses premiers discours après son entrée en fonction : « Aujourd’hui, fini de rêver. » Tout est dit.

jeudi 18 octobre 2018

Flore et Interallié sont dans un bateau...

... Et nombreux sont ceux qui tombent à l'eau: Meryem Alaoui, Inès Bayard, Samuel Benchetrit, Morgane Caussarieu, François-Xavier Delmas et Loulou Robert au Flore (attribution le 8 novembre), David Diop, Olivia de Lamberterie, Alexandre Najjar et Boualem Sansal à l'Interallié (date incertaine, mais pas avant le 12 novembre).
Ce qui nous laisse; au Prix de Flore:
  • Emmanuelle Bayamack-Tam. Arcadie (P.O.L)
  • Mathilde-Marie de Malfilâtre. Babylone Express (Le Dilettante)
  • Nicolas Mathieu. Leurs enfants après eux (Actes Sud)
  • Raphaël Rupert. Anatomie de l'amant de ma femme (L'Arbre vengeur)

Et, au Prix Interallié:
  • Laurence Cossé. Nuit sur la neige (Gallimard)
  • Paul Greveillac. Maîtres et esclaves (Gallimard)
  • Stéphane Hoffmann. Les belles ambitieuses (Albin Michel)
  • Philippe Lançon. Le lambeau (Gallimard) 
  • Camille Pascal. L’été des quatre rois (Plon)
  • Thomas B. Reverdy. L’hiver du mécontentement (Flammarion)

Les échéances se rapprochent...

mercredi 22 novembre 2017

Un Interallié très viril

Ils nous auront tout fait, à l'Interallié: Jean-René Van der Plaetsen, qui avait déjà reçu le Prix Jean Giono (par le fait dévalué d'un coup, comme sa dotation) pour La nostalgie de l'honneur, est le lauréat que je n'attendais pas.
Ce n'est pas à l'honneur d'un jury dans lequel il n'y a que des hommes, et des hommes plutôt d'un certain âge, peut-être destinés à apprécier les valeurs désuètes, et présentées de la même manière, véhiculées dans un livre dont je vous ai déjà parlé en levant les bras au ciel, signe d'un désespoir que seul un vote, aujourd'hui, en faveur de François-Henri Désérable et son Un certain M. Piekielny aurait pu compenser.
Mais il sera dit que ce livre, qui a provoqué dans un premier temps un enthousiasme sans mélange, qui ensuite a été consciencieusement démoli par une partie de la critique comme si celle-ci était en service commandé, ne pouvait recevoir aucun prix littéraire. Trop brillant, trop joueur, trop Gary? Peu importe. Ce sera un des quelques livres de la rentrée qu'on retiendra.

jeudi 26 octobre 2017

Jean-René Van der Plaetsen, Prix Jean Giono et sélection Interallié

Si le jury Interallié procède par élimination, retenant dans leur dernière sélection (elle vient d'être communiquée) un certain nombre d'ouvrages susceptibles de recevoir d'autres prix afin de les consoler, le moment venu, en couronnant l'un des déçus par un bandeau rouge absent, voilà déjà que le terrain se dégage: Jean-René Van der Plaetsen, présent comme sept autres auteurs dans la liste fraîchement venue, n'a plus de raison de se trouver là. Le Prix Jean Giono vient de lui être attribué pour La nostalgie de l'honneur. Ce qui ne provoquera pas chez moi un élan lyrique d'enthousiasme.
La sincérité de l’hommage au grand-père, dont le sens de l’honneur a fait un héros dans quelques pages d’histoire souvent tragiques du XXe siècle, est remarquable. Mais était-il nécessaire de convoquer, dans une sorte de tribunal destiné à canoniser un homme, tant d’autres grandes pages guerrières ? Comme si l’idéal plus haut que l’individu devait se concrétiser dans les combats, et seulement là. Une légère gêne empêche d’être convaincu.
Quant à l'ensemble de la sélection pour le Prix Interallié, qui sera attribué le 8 novembre comme le Femina et le Flore (deux jours après les Goncourt et Renaudot, au lendemain du Décembre et à la veille du Médicis), la voici. Elle ressemble à ce que j'annonçais au début.
  • Kaouther Adimi. Nos richesses (Seuil)
  • Jean-François Désérable. Un certain M. Piekielny (Gallimard)
  • Pauline Dreyfus. Le déjeuner des barricades (Grasset)
  • Nicolas d’Estienne d’Orves. La gloire des maudits (Albin Michel)
  • Adrien Goetz. Villa Kerylos (Grasset)
  • Olivier Guez. La disparition de Josef Mengele (Grasset)
  • Philippe Jaenada. La serpe (Julliard)
  • Jean-René Van der Plaetsen. La nostalgie de l’honneur (Grasset)
P.-S. Les doutes que j'avais émis sur le calendrier de l'Interallié à l'occasion de la première sélection étaient justifiés: Livres Hebdo annonce, par un tweet, qu'il y aura bien une troisième sélection à la date du 8 novembre, et que la date de remise du prix sera communiquée ultérieurement.

lundi 18 septembre 2017

La paresse du Prix Interallié

Quel est l'original, parmi les jurés du Prix Interallié, qui est arrivé aujourd'hui, au moment d'établir la première sélection, avec les noms de Kamel Daoud, Nicolas d'Estienne d'Orves, Arnaud de La Grange, Adrien Goetz et Romain Slocombe? Les cinq noms qui ne se trouvaient jusqu'à présent dans aucune autre des sélections pour les prix les plus importants, commercialement parlant, de l'automne. C'est-à-dire, dans l'ordre chronologique de leur attribution, le Goncourt, le Renaudot, le Femina et le Médicis.
Sur les quatre listes, François-Henri Désérable était présent dans 100% des cas (il a toutes les chances de gagner au Loto), Kaouther Adimi dans 75% des mêmes cas, comme Olivier Guez, Philippe Jaenada. Monica Sabolo était à 25%, comme Jean-Luc Coatalem, Pauline Dreyfus, Philippe Lacoche, Hervé Le Tellier, Daniel Rondeau, Justine Augier et Jean-René Van der Plaetsen (ces deux derniers pour le Renaudot de l'essai). 17 noms, donc, dont bien sûr aucun premier roman - pourquoi tenter l'audace quand on a tellement envie de confort? (Vous me direz qu'au Goncourt non plus, il n'y a pas de premier roman, alors que la rentrée proposait quelques cas intéressants.)
Si quelqu'un a dit à ces lecteurs du dimanche que 390 romans français étaient publiés à la rentrée et qu'ils avaient le droit d'en ouvrir d'autres que ceux avec lesquels tous les autres jurys font leurs sélections, ils ne sont pas nombreux à l'avoir entendu. Et à être allé voir, au hasard des meilleures lectures que j'ai faites jusqu'ici, du côté de Thomas Vinau (sélectionné au Wepler quand même), Sébastien Spitzer, Victor Pouchet ou Gaëlle Nohant (trop populaire? vous allez encore faire râler Gérard Collard, qui aura beau jeu de dénoncer l'élitisme parisien). Par exemple.
Bref, vous la voulez quand même, cette liste, alors que je vous ai déjà énuméré tous les auteurs qui s'y trouvaient? La voici, presque tout de suite. Elle est destinée à se réduire le 25 octobre avec l'annonce de la deuxième sélection, et peut-être à se limiter au nom du ou de la lauréat(e) le 8 novembre - je dis "peut-être", parce que Livres Hebdo annonce la proclamation à cette date, celle du Femina (et du Flore), alors que l'Interallié a l'habitude d'attendre que tout le monde ait fait ses choix pour les "corriger" (j'ai vu quelqu'un rire! suffit!), et que Actualitté, promet, le 8 novembre, une troisième sélection. Attendons voir.
  • Kaouther Adimi. Nos richesses (Seuil)
  • Justine Augier. De l’ardeur (Actes Sud)
  • Jean-Luc Coatalem. Mes pas vont ailleurs (Stock)
  • Kamel Daoud. Zabor (Actes Sud)
  • Jean-François Désérable. Un certain M. Piekielny (Gallimard)
  • Pauline Dreyfus. Le déjeuner des barricades (Grasset)
  • Nicolas d’Estienne d’Orves. La gloire des maudits (Albin Michel)
  • Arnaud de La Grange. Les vents noirs (Lattès)
  • Adrien Goetz. Villa Kerylos (Grasset)
  • Olivier Guez. La disparition de Josef Mengele (Grasset)
  • Philippe Jaenada. La serpe (Julliard)
  • Philippe Lacoche. Le chemin des fugues (Rocher)
  • Hervé Le Tellier. Toutes les familles heureuses (J.-C. Lattès)
  • Daniel Rondeau. Mécaniques du chaos (Grasset)
  • Monica Sabolo. Summer (J.-C. Lattès)
  • Romain Slocombe. L’étoile jaune de l’inspecteur Sadorski (Robert Laffont)
  • Jean-René Van der Plaetsen. La nostalgie de l’honneur (Grasset)
P.-S. Les amateurs de chiffres, parmi vous, auront noté que les écrivains présents sur 25% des premières sélections de quatre prix littéraires sont passés à 40% de cinq. De la même manière, les 75% deviennent 80% et seul François-Henri Désérable, malgré, j'en suis sûr, son envie de mlieux faire, est resté bloqué à 100%. Les cinq nouveaux venus se contentent donc de 20%.

mardi 8 novembre 2016

Le Prix Interallié à Serge Joncour

Les jurys ne traînent pas, cette année, en général. Comme tant d'autres prix depuis deux semaines, l'Interallié a été attribué dès le premier tour, à Serge Joncour pour Repose-toi sur moi, avec six voix contre trois à Eric Vuillard (mon favori) et deux à Gaël Faye.
Serge Joncour est un écrivain dont l'oeuvre, déjà abondante, avait été plusieurs fois signalée par des prix moins établis. Il a reçu le Prix Jean-Freustié en 1999, le Prix France Télévisions en 2003, le Prix de l'Humour noir en 2005, le Prix littéraires des Hebdos en Région en 2013, le Prix des Deux Magots en 2015. Il fallait bien qu'il trouve sa place dans un palmarès comme celui de l'Interallié. C'est donc fait.
Tout sépare Aurore, styliste dont le mari brasse des millions de dollars, et Ludovic, spécialisé dans le recouvrement de dettes, ancien agriculteur. Tout les rapproche, malgré leur situation dans l’immeuble où ils habitent tous deux, elle côté chic, lui côté modeste. Elle est dans les embrouilles d’une société qui va peut-être lui échapper, il est dans la débrouille devant des situations inextricables. Et ils s’aiment, tant pis pour eux.

jeudi 20 octobre 2016

L'Interallié et le Jean-Giono réduisent la voilure

Ces prix-là seront décernés alors que la plupart des autres seront déjà connus. D'une certaine manière, cela simplifiera la tâche pour les jurés des Prix Interallié, le 8 novembre (avec une dernière sélection annoncée le 3), et Jean-Giono, le surlendemain.
Il reste six titres pour le premier des deux, qui fut une récompense de journalistes pour des journalistes - mais l'ADN a muté depuis longtemps. Leïla Slimani, qui était devenue la plus citée dans les diverses sélections, a disparu, ainsi que François Cérésa, Catherine Cusset, Jean-Paul Dubois, Lionel Duroy, Stéphane Hoffmann et Karine Tuil. Tandis que François Duteurtre s'ajoute à cinq autres romanciers, dont une romancière, sauvés des eaux. Les voici.
  • Paul Baldenberger, A la place du mort (Les Equateurs)
  • Adélaïde de Clermont-Tonnerre, Le dernier des nôtres (Grasset)
  • Benoît Duteurtre. Livre pour adultes (Gallimard)
  • Gaël Faye, Petit pays (Grasset)
  • Serge Joncour, Repose-toi sur moi (Flammarion)
  • Eric Vuillard, 14 Juillet (Actes Sud)

Du côté du Prix Jean-Giono, la dernière liste a des allures de partie finale, ce qui laisse encore vingt jours pour relire. Guy Boley, Adélaïde de Clermont-Tonnerre, Eric Deschodt, Jean-Paul Dubois, Claudie Hunzinger, Serge Joncour et Olga Lossky ont laissé toute la place à ceux-ci:
  • Alain Blottière. Comment Baptiste est mort (Gallimard)
  • Jean-Baptiste Del Amo. Règne animal (Gallimard)
  • Stéphane Hoffmann. Un enfant plein d'angoisse et très sage (Albin Michel)
Ce qui, d'une certaine manière, est assez cohérent...

mardi 27 septembre 2016

Prix Interallié, on prend presque les mêmes

Ce n'est pas une véritable surprise, je vous le répète chaque année: le Prix Interallié, en fin de saison, vient comme un lot de consolation, le tirage après le grattage, en somme. Et tout naturellement, on prend, à peu de choses près (un titre, en fait), des romans déjà sélectionné par d'autres jurys. L'exception est l'ouvrage de Paul Baldenberger, le premier dans l'ordre alphabétique, ça tombe bien, on le remarque.
La seule petite surprise, c'est qu'on ne savait pas quand allait être annoncée cette première sélection. On a un peu plus de renseignements pour la suite: deuxième sélection le 19 octobre, troisième le 3 novembre et proclamation du résultat final le 8, le même jour que le Prix de Flore - et le lendemain du Prix Décembre.
On n'attend plus que la première sélection du Grand Prix du Roman de l'Académie française, ce sera jeudi. Tout de suite, celle de l'Interallié
  • Paul Baldenberger, A la place du mort (Les Equateurs)
  • François Ceresa, Poupe (Le Rocher)
  • Adélaïde de Clermont-Tonnerre, Le dernier des nôtres (Grasset)
  • Catherine Cusset, L'autre qu'on adorait (Gallimard)
  • Jean-Paul Dubois, La succession (L'Olivier)
  • Lionel Duroy, L'absente (Julliard)
  • Gaël Faye, Petit pays (Grasset)
  • Stéphane Hoffmann, Un enfant plein d'angoisse et très sage (Albin Michel)
  • Serge Joncour, Repose-toi sur moi (Flammarion)
  • Leïla Slimani, Chanson douce (Gallimard)
  • Karine Tuil, L'insouciance (Gallimard)
  • Eric Vuillard, 14 Juillet (Actes Sud)

La liste complète des sélections en cours d'élaboration se trouve dans ce document.

jeudi 12 novembre 2015

Laurent Binet, Prix Interallié

Je sais que certains trouvent que La septième fonction du langage est un livre potache. Ou même un crime de lèse-majesté parce qu'il s'en prend avec légèreté à quelques figures du monde intellectuel parisien (si c'est bien cela, le monde intellectuel) dont l'une, que je ne nommerai pas aujourd'hui, subit même les derniers outrages.
Il n'empêche, si vous voulez savoir ce que je pense (et, après tout, si vous êtes ici, c'est peut-être pour cela), Laurent Binet est un écrivain qui détourne les codes, qu'il s'agisse des mécanismes de l'Histoire dans son premier roman, HHhH, du récit de campagne électorale dans Rien ne se passe comme prévu ou, cette année, de la mort de Roland Barthes - né il y a aujourd'hui cent ans et à qui Philippe Sollers (aïe! je l'ai nommé!) consacre d'ailleurs un petit ouvrage récent.
Laurent Binet se moque, c'est entendu. Mais pas que. Si vous voulez tout savoir, ou presque, de la manière dont il joue avec le langage, son analyse et ceux qui font métier de l'étudier, ou qui faisaient ce métier dans les années 80, je vous conseille de retourner, dans ce même blog, quelques semaines en arrière, le 1er septembre, jour où le Prix du roman Fnac lui avait déjà été attribué pour ce même roman. J'y reproduisais l'entretien qu'il m'avait donné, par écrit et du Pérou où il se trouvait avant la sortie de son livre, à propos de La septième fonction du langage.

vendredi 6 novembre 2015

Un Prix Interallié, quatre candidats

On souffle un peu après l'avalanche des prix littéraires de la semaine? A peine. Dès lundi, le Prix Wepler-Fondation La Poste et le Grand Prix de littérature américaine nous rappelleront que la saison n'est pas terminée. Le lendemain, ce sera le tour du Prix de Flore et, jeudi, du Prix Interallié. Il en restera encore quelques-uns plus tard, comme une queue de comète qui ne s'éteint pas si facilement.
A propos du Prix Interallié, précisément, son jury a profité du brouhaha des derniers jours pour glisser en catimini une dernière sélection de quatre titres.
Philippe Lacoche, Olivier Poivre d’Arvor, Nathalie Rheims et Boualem Sansal ont donc disparu tandis que, à la surprise générale, Philippe Jaenada, dont on ne parlait pas du tout pour ce prix, fait son apparition. Il reste quatre écrivains, aucune écrivaine, et ils sont équitablement répartis entre deux maisons d'édition, Grasset et Julliard.
  • Laurent Binet, La septième fonction du langage (Grasset)
  • Charles Dantzig, Histoire de l’amour et de la haine (Grasset)
  • Lionel Duroy, Echapper (Julliard)
  • Philippe Jaenada, La petite femelle (Julliard)

jeudi 22 octobre 2015

L'Interallié hésite encore

Dernier prix de la série classique, et, comme je l'ai déjà dit, prix de rattrapage, l'Interallié se donne encore la possibilité d'une troisième sélection le 4 novembre, huit jours avant le choix définitif qui sera fait le 12, mais après Goncourt, Décembre, Renaudot - et le jour du Femina. A ce petit jeu, Christophe Boltanski, Eve de Castro, Mathias Enard, René Guitton, Monica Sabolo et Amanda Sthers ont perdu toutes leurs chances, dommage pour Mathias Enard - mais il mérite tellement mieux qu'un prix de rattrapage, n'est-ce pas?
Des treize romans retenus dans la première sélection, il en reste sept:
  • Laurent Binet, La septième fonction du langage (Grasset)
  • Charles Dantzig, Histoire de l’amour et de la haine (Grasset)
  • Lionel Duroy, Echapper (Julliard)
  • Philippe Lacoche, Vingt-quatre heures pour convaincre une femme (Ecriture)
  • Olivier Poivre d’Arvor, L’amour à trois (Grasset)
  • Nathalie Rheims, Place Colette (Léo Scheer)
  • Boualem Sansal, 2084 (Gallimard)

vendredi 25 septembre 2015

Prix Interallié, on prend (presque) les mêmes

La vocation du Prix Interallié, qui était à l'origine de mettre en évidence un roman écrit par un journaliste, s'est progressivement infléchie pour en faire, le plus souvent, un prix de rattrapage: on couronne celui qui aurait dû avoir un grand prix d'automne la semaine dernière et qui, à la surprise générale - et davantage encore pour la grande consternation de son éditeur -, n'a été choisi par aucun jury. On verra, le 12 novembre, s'il en va de même que les années où Houellebecq, BHL, Beigbeder (je cite de mémoire, un peu au hasard) ont ainsi été raccroché au dernier wagon d'un train de best-sellers qui partait sans eux.
Il faut cependant rendre justice à cette première sélection: une grosse moitié des ouvrages (sept sur treize) ne sont cités nulle part ailleurs, comme vous pourrez le vérifier dans le document où je regroupe toutes les listes des prix littéraires 2015. On saura, à la fin du parcours, s'ils étaient là pour faire nombre ou pour de meilleures raisons. Les voici tous, par ordre alphabétique d'auteur:
  • Laurent Binet, La septième fonction du langage (Grasset)
  • Christophe Boltanski, La cache (Stock)
  • Eve de Castro, Nous, Louis, roi (L’Iconoclaste)
  • Charles Dantzig, Histoire de l’amour et de la haine (Grasset)
  • Lionel Duroy, Echapper (Julliard)
  • Mathias Enard, Boussole (Actes Sud)
  • René Guitton, Mémoires fauves (Calmann-Lévy)
  • Philippe Lacoche, Vingt-quatre heures pour convaincre une femme (Ecriture)
  • Olivier Poivre d’Arvor, L’amour à trois (Grasset)
  • Nathalie Rheims, Place Colette (Léo Scheer)
  • Monica Sabolo, Crans-Montana (JC Lattès)
  • Boualem Sansal, 2084 (Gallimard)
  • Amanda Sthers, Les promesses (Grasset)
Pour les curieux, et parce que la sélection comprend "le" livre de la rentrée défendu avec ardeur par Claro, ce qui ne me laisse pas indifférent - mais je n'ai pas ce roman, de Marie Cosnay -, malgré le manque de consistance d'un jugement sur une seule page, voici aussi la sélection du Prix de la page 111, qui sera attribué la semaine prochaine, le 1er octobre - tard, très tard:
  • Mika Biermann, Booming (Anarchasis)
  • Marie Cosnay, Cordelia la guerre (L'Ogre)
  • Didier Goupil, Le journal d'un caméléon (Le Serpent à plumes)
  • Pascal Manoukian, Les échoués (Don Quichotte)
  • Boualem Sansal, 2084 (Gallimard)
  • Pierre Senges, Achab (séquelles) (Verticales)
Enfin, le Prix Sade a désigné hier son lauréat de l'année et... ils sont deux: Jean-Noël Orengo, La fleur du capital (Grasset) et Andrée Wilhelmy, Des sangs (Grasset).
Voilà, je crois que vous savez tout pour l'instant.

mardi 20 janvier 2015

Nelly Alard à l'ombre de Simone de Beauvoir

Il avait beaucoup été question, à Paris, du roman de Nelly Alard, Moment d’un couple (Gallimard), dès le moment de sa sortie à la fin du mois d’août 2013. Les milieux bien informés se chuchotaient, raconte-t-on, les noms des véritables protagonistes de cette aventure amoureuse d’un journaliste qui met son couple en péril à cause d’une liaison avec une femme politique. On veut croire que le jury du Prix Interallié, qui a couronné ce livre, ne l’a pas jugé comme une page de la presse people mais s’est contenté de ses qualités littéraires.
Si les amants y ont leur place, puisqu’ils bousculent un ordre établi, le personnage principal est Juliette, l’épouse d’Olivier, le journaliste, heureuse avec lui depuis dix ans et confiante dans leur relation. Deux enfants, une existence professionnellement valorisante – elle élabore de gros projets informatiques – et des amis sur qui ils peuvent compter font d’eux un couple idéal. Sinon qu’Olivier a cédé à la séduction de Victoire, socialiste et féministe. Il avoue un jour à Juliette que « ça dure depuis trois semaines ». Et tout s’écroule.
Juliette est une femme raisonnable, ou qui tente de l’être. Même quand elle hurle à l’intérieur, elle reste capable la plupart du temps d’envisager les choses avec le minimum de distance nécessaire pour peser les conséquences de ses propres réactions. Elle se trouve pourtant dans une situation pour le moins délicate. D’une part, elle connaît assez son mari pour savoir qu’il est incapable de prendre une décision radicale aussi simple qu’une rupture définitive et qu’il ira plutôt vers celle des deux qui lui montrera le plus d’amour, ou de besoin de lui. D’autre part, Victoire, sur qui d’abord elle ne veut rien savoir, même pas son prénom (elle se contente, un certain temps, de la première lettre, V), semble cultiver l’hystérie à un degré très élevé et les menaces de suicide sont à peu près les annonces les plus anodines de ce qui arrivera si Olivier la quitte…
Nelly Alard pose les faits et fouille le cœur de Juliette avec un scalpel particulièrement aiguisé. L’âme à nu, son héroïne devient presque celle de La femme rompue, de Simone de Beauvoir. Le roman est cité plusieurs fois. Et, chez Simone de Beauvoir, l’homme marié finit par quitter sa femme pour sa maîtresse. Voilà qui n’annonce rien de bon sur le chemin d’une reconstruction amoureuse d’autant moins évidente que Victoire ne lâche jamais rien. Jusqu’au pied de nez final, en forme de pirouette.

jeudi 20 novembre 2014

Clôture en beauté, l'Interallié à Mathias Menegoz

C'est un beau dernier prix littéraire pour une saison somme toute très satisfaisante: Karpathia, le premier roman de Mathias Menegoz, vient de recevoir le Prix Interallié, par six voix contre quatre aux Nouveaux monstres, de Simonetta Greggio.
Un premier roman solide et atypique, comme presque plus personne n’ose en écrire et moins encore, peut-être, en publier : venu en droite ligne d’Alexandre Dumas, Karpathia, de Mathias Menegoz, est un pur bonheur de lecture, une longue évasion de 700 pages vers les années 1830, dans une Transylvanie où tout semble très, très lointain. La population y vit encore selon un régime féodal, à l’écart des révolutions qui agitent l’Europe.
Le premier paragraphe du livre fournit un début d’explication à cet immobilisme : « L’Empire d’Autriche fut moins affecté que ses voisins car le prince Metternich réussit à maintenir un couvercle policier et bureaucratique particulièrement pesant sur toutes les aspirations libérales. » La suite montrera comment l’absence de moyens de communication rapide entre Vienne et la Transylvanie permet d’y perpétuer un ordre ancien, en même temps que d’y instaurer des désordres variés.
Car, si Karpathia a tout d’un roman historique par une documentation en apparence très complète, il est aussi un roman d’aventures où l’héroïsme cohabite avec la veulerie, où la lutte pour la survie va de pair avec la conquête des richesses et où l’amour n’est pas en reste.
Le comte Alexander Korvanyi, d’origine hongroise, est promis à un bel avenir dans l’armée impériale. Mais il est amoureux de Cara von Amprecht, qui n’envisage pas un instant d’être la femme d’un militaire. C’est pour elle qu’il quitte la carrière des armes, non sans régler une dette d’honneur : alors que les esprits étaient échauffés après un spectacle, von Wieldnitz a traité Cara de « vraie Diane chasseresse », autant dire de prostituée. L’échange de coups ne suffit pas à laver la réputation de la femme aimée : il faut aller au duel. La scène est cinématographique mais filmée, si l’on ose dire, par le personnage principal.
Celui-ci n’a pas fini de nous entraîner sur le chemin des combats, après un voyage pénible, surtout pour Cara qu’il a épousée, vers ses terres. Il les trouve dans un état déplorable, se demande s’il n’est pas grugé par son intendant et doit faire face à une insécurité bien plus grande que celle de nos villes. Une bande de forestiers, organisée pour la contrebande et le pillage, craint de voir son influence réduite avec l’arrivée du comte sur ses propriétés et une véritable guerre s’engage. Un peu décousue dans son déroulement, certes, mais nous ne sommes pas dans le dix-neuvième siècle des Etats européens, plutôt dans une sauvagerie moyenâgeuse qui se manifeste par une sorte de guérilla avant l’heure.
Mathias Menegoz mène furioso les événements et une foule de personnages. Karpathia est de ces livres qu’on entame en se posant bien des questions sur le plaisir ou l’ennui qui nous attend. Celui-ci ne s’installe jamais, celui-là est constant, relancé sans cesse par les faits ou la relation de couple entre Alexander et Cara.

jeudi 13 novembre 2014

Quatre pour un Interallié

Deux des romans sélectionnés pour le Prix Interallié, qui sera remis le 20 novembre, ont été servis au passage: celui d'Adrien Bosc, Grand Prix du roman de l'Académie française, et celui de David Foenkinos, Renaudot.
Puisqu'il faut quand même faire mine de travailler en resserrant la sélection, on a divisé par deux, en partant du haut dans l'ordre alphabétique des auteurs. Dans la moitié supérieure, il y avait déjà Bosc et Foenkinos. Christophe Donner et Pauline Dreyfus (auteurs Grasset, une maison qui a longtemps été privilégiée dans le palmarès) les ont donc accompagnés, personne ne sait ce qu'ils sont devenus.
En revanche, il reste du beau monde, c'est-à-dire trois romanciers qui auraient pu espérer autre chose, et une que, probablement, seuls les jurés de l'Interallié ont lue (moi non plus, je l'avoue, mais ce sera réparé bientôt). Résultat de ce dernier écrémage, avec une sélection restreinte à quatre livres:
  • Simonetta Greggio. Les Nouveaux Monstres (Stock)
  • Serge Joncour. L’Ecrivain national (Flammarion)
  • Mathias Menegoz. Karpathia (P.O.L.)
  • Eric Reinhardt. L’Amour et les forêts (Gallimard)

vendredi 31 octobre 2014

L'Interallié, voiture-raclette des prix littéraires

Il est urgent de ne pas se presser, se dit-on, au moins en apparence, du côté du Prix Interallié, qui vient enfin de fixer la date à laquelle sera annoncé le nom du lauréat (ou de la lauréate, puisqu'il reste deux romancières dans la deuxième sélection, contre six romanciers).
Ce sera le 20 novembre, au moment d'éteindre les lumières et de partir en catimini, que d'autres se chargent du rangement!
Huit jours avant, il devrait y avoir une dernière sélection, dans laquelle seront retenus, comme c'est la coutume, celles et ceux qui sont passés pas loin, mais à côté quand même, d'un autre prix littéraire. Et qu'on obligera à rester plus longtemps en classe en espérant un lot de consolation.
Donc, ils sont encore huit - moins un, déjà, Adrien Bosc s'étant auto-éliminé grâce à l'Académie française:
  • Adrien Bosc. Constellation (Stock)
  • Christophe Donner. Quiconque exerce ce métier stupide mérite tout ce qui lui arrive (Grasset)
  • Pauline Dreyfus. Ce sont des choses qui arrivent (Grasset)
  • David Foenkinos. Charlotte (Gallimard)
  • Simonetta Greggio. Les Nouveaux Monstres (Stock)
  • Serge Joncour. L’Ecrivain national (Flammarion)
  • Mathias Menegoz. Karpathia (P.O.L.)
  • Eric Reinhardt. L’Amour et les forêts (Gallimard)

A l'exception de Simonetta Greggio, ce sont les livres qu'on retrouve à peu près partout ailleurs. Il ne s'agit même plus de jouer aux suiveurs, le jury de l'Interallié est devenu la voiture-balai de la rentrée - ou, comme le dirait Stéphane de Groodt dans Retour en absurdie, la voiture-raclette ("c'est comme une voiture-balai mais sans poils").

samedi 4 octobre 2014

Prix Interallié, 14 romans

C'est assez curieux: on ne sait pas quand sera attribué, cette année, le Prix Interallié. Tout juste les jurés ont-ils consenti à dire qu'ils publieraient une seconde sélection le 29 octobre. Et s'ils annonçaient, par surprise, leur lauréat ce jour-là? Rien d'impossible quand on voit Adrien Bosc et Eric Reinhardt encore présents dans leur première liste. Où il se trouve, heureusement, quelques ouvrages moins disputés par tous les prix d'automne. Je vous laisse les découvrir.

  • Christian Authier. Le Soldat d’Allah (Grasset)
  • Adrien Bosc. Constellation (Stock)
  • Christophe Donner. Quiconque exerce ce métier stupide mérite tout ce qui lui arrive (Grasset)
  • Pauline Dreyfus. Ce sont des choses qui arrivent (Grasset)
  • Nicolas d’Estienne d’Orves. La Dévoration (Albin Michel)
  • David Foenkinos. Charlotte (Gallimard)
  • Simonetta Greggio. Les Nouveaux Monstres (Stock)
  • Stéphane Guibourgé. Les Fils de rien, les princes, les humiliés (Fayard)
  • Serge Joncour. L’Ecrivain national (Flammarion)
  • Mathias Menegoz. Karpathia (P.O.L.)
  • Jean-Marc Parisis. Les Inoubliables (Flammarion)
  • Eric Reinhardt. L’Amour et les forêts (Gallimard)
  • Romain Slocombe. Avis à mon exécuteur (Robert Laffont)
  • Min Tran Hui. Le Voyageur malgré lui (Flammarion)

mercredi 20 novembre 2013

Le bilan des prix littéraires 2013

Que vaut le millésime 2013 des prix littéraires ? Une bonne cuvée, un grand cru, de la piquette ? Je vais me retenir, ce n’est pourtant pas l’envie qui manque, d’évoquer les livres qui auraient eu belle allure dans les palmarès, je vais même, allons jusqu’au bout dans la naïveté, faire mine d’ignorer les manœuvres qui mobilisent les éditeurs en coulisses. Et me contenter, donc, de ces ouvrages déjà sous bandes affriolantes : Goncourt, Renaudot, etc., jusqu’à l’Interallié d’hier pour clore la distribution.
Le bilan est globalement positif, pour le dire très vite. Il est surtout, c’est sa plus grande qualité, très varié : il y en a pour tous les goûts. Du vécu, du romanesque, du choc des cultures, de l’ego, de la guerre, du théâtre, du facile à lire comme un feuilleton et du plus ardu qui oblige à se concentrer.
L’année dernière, le roman d’un jeune Suisse inconnu, ou presque, était devenu le best-seller de l’automne, propulsé par l’Académie française et le Goncourt des Lycéens : La vérité sur l’affaire Harry Quebert, de Joël Dicker. Le livre, épais, se lisait sans effort particulier et procurait un vif plaisir. Au revoir là-haut, de Pierre Lemaitre, prix Goncourt cette année, semble renouveler la formule, en y ajoutant le parfum d’une commémoration de la Grande Guerre dont on va prendre pour cinq ans puisque, oui, c’est commencé avant l’heure. Mais, s’agissant de Pierre Lemaitre, auteur de romans noirs célébré dans le genre, et moins connu par les lecteurs de littérature « blanche », personne ne songera à s’en plaindre. Surtout pas les libraires…
De toute manière, la facilité n’est pas la norme cette année – elle ne l’était pas davantage l’an dernier, d’ailleurs, et cette remarque est à porter au crédit des jurys littéraires. Yann Moix n’impressionne pas seulement par le volume de Naissance (Renaudot), il pratique aussi une écriture radicale qui indispose ou séduit, c’est selon – elle suscite en tout cas des réactions. Leonora Miano, dans La saison de l’ombre (Femina), nous parle d’un monde dont nous ne connaissons souvent que quelques clichés. Et, s’agissant de démonter des clichés, Marie Darrieussecq s’est emparée avec talent de la relation entre une femme blanche et un homme noir (Il faut beaucoup aimerles hommes, Médicis).
Je viens de citer deux femmes et on fait souvent remarquer leur place réduite dans les listes d’auteurs primés. Nelly Alard, en remportant hier le Prix Interallié (Moment d’un couple), succède, comme écrivaine, à Dominique Bona, couronnée en… 1992 ! Bien joué, avec un roman sur la fragilité d’un couple qui part à la dérive et où l’épouse tente de construire un radeau afin de sauver ce qui peut l’être.
Monica Sabolo, autre femme, parle aussi d’amour dans Tout cela n’a rien à voir avec moi (Flore). Tout comme, d’ailleurs, Christophe Ono-dit-Biot, homme cependant, dans Plonger(Académie française). Et Le quatrième mur, de Sorj Chalandon (Goncourt des Lycéns), n’est pas un livre sans amour même s’il s’agit surtout d’une guerre et de l’espoir de la tenir à distance le temps d’une représentation théâtrale.

Ce n’est pas mal du tout, cette liste. Chacun y trouvera son compte.