Depuis deux ans,
Jean-Paul Colize va de surprise en surprise. De bonne en excellentes
surprise : Back up, son antépénultième roman, figurait en novembre 2012 dans la sélection finale du Prix
Rossel et a été réédité en poche un peu plus tard ; son avant-dernier, Un long moment de silence, a reçu le prix Landerneau du polar, succédant, excusez du peu, au Mapuche de Caryl Férey, avant d'être à nouveau sélectionné pour le Rossel, de recevoir quelques autres récompenses et d'être réédité en poche aujourd'hui, quelques jours après la sortie d'un nouveau roman, L'avocat, le nain et la princesse masquée.
Un long moment de silence ne cède cependant pas à la facilité et place même
la barre très haut vis-à-vis de lecteurs habitués à suivre des personnages pour
lesquels ils éprouvent un minimum d’empathie. Stanislas Kervyn, patron d’une boîte
informatique florissante, n’est pas le genre de bonhomme avec qui on a envie de
nouer des relations amicales, serait-ce même à travers une fiction. Au boulot,
c’est une vraie teigne. Au lit, c’est un baiseur compulsif pour lequel le sexe
équivaut à une séance de gymnastique – et un peu à une thérapie, puisque cela
soulage ses migraines. Oui, il souffre. Pas assez cependant pour éveiller notre
compassion.
En revanche, il a dans la
vie un autre centre d’intérêt avec lequel le romancier compte retenir l’attention :
la mort de son père à l’aéroport du Caire en 1954, lors d’une tuerie restée
inexpliquée. Il a raison, ça fonctionne. Pour comprendre ce qui s’est passé,
Stanislas a mené une longue enquête de laquelle il a tiré un livre. Mais, au
terme de celui-ci, l’énigme n’est pas résolue. Après un passage à la
télévision, il reçoit un mystérieux coup de téléphone qui change tout, l’oblige
à reconnaître qu’il s’est trompé en négligeant le rôle peut-être joué par son
père en Egypte à cette époque et le relance sur des pistes auparavant négligées,
du côté de la Pologne et de l’Allemagne, en compagnie d’une traductrice
charmante et efficace à laquelle, hors travail, il ne pose qu’une question :
on baise ?
Décidément incorrigible, ce Stanislas. Mais
obstiné, aussi. Sa fortune personnelle et les capacités professionnelles de ses
employés lui permettent de tirer tous les fils qui passent à sa portée, même
s’ils le conduisent très loin. C’est une véritable pelote imprégnée d’Histoire
et de tragédie, à l’intérieur de laquelle la justice et la vengeance agissent à
parts à peu près égales. C’est le cœur d’un roman passionnant où Jean-Paul
Colize confirme ses moyens de romancier capable de mener un récit sur plusieurs
plans dont chacun nous apporte un fragment de réalité.
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