Zeitoun, de
Dave Eggers, a tout d’un roman. Il raconte l’histoire presque incroyable de
Zeitoun (d'où le titre), pendant et après l’ouragan Katrina qui a frappé La Nouvelle-Orléans en
2005. A la différence d’un roman, tout est vrai. Zeitoun est le résultat de trois ans d’entretiens et de recherches
pendant lesquels Dave Eggers a longuement rencontré Abdulrahman Zeitoun, son
épouse Kathy ainsi que sa famille en Syrie et en Espagne.
La première moitié du
récit raconte l’arrivée de Katrina et la survie dans une ville dévastée. Une
ville que la littérature a déjà décrite, avant l’ouragan dans En attendant Babylone, d’Amanda
Boyen, ou pendant avec L’œil du cyclone,
de Stéphanie Janicot, et Ouragan, de
Laurent Gaudé – par exemple. Zeitoun
propose, pour l’essentiel, le point de vue du personnage principal, et en
contrepoint celui de Kathy qui a décidé de quitter la ville avec leurs enfants,
tandis que son mari gardait la maison pour la protéger, autant que possible,
des intempéries et des éventuels pillages annoncés après celles-ci.
Puis tout bascule. D’un
coup, Kathy n’a plus aucune nouvelle de Zeitoun et l’inquiétude monte. A-t-il
été attaqué et tué par des voleurs ? Le bilan de la catastrophe est de
plus en plus lourd, les soldats sont de plus en plus nombreux. Qu’est devenu
son mari ? Après presque deux semaines de silence, Kathy reçoit un rapide
coup de téléphone : Zeitoun est en prison et va bien…
Commence alors le récit
d’une folie. Complètement dépassées par les événements, la police, l’armée et
la garde nationale ont monté dans la gare routière une prison ressemblant à
celle de Guantanamo et ont ramassé dans la ville encore inondée tout ce qui
ressemblait à un voleur ou à un… Syrien, comme Zeitoun. Accusé d’appartenir à
Al-Qaïda avec les trois compagnons d’infortune qui étaient avec lui à ce
moment, il est incarcéré pendant plus de trois semaines, sans aucune
possibilité de se défendre, sans aucun chef d’accusation, sans rien comprendre,
en fait, à ce qui lui arrive.
Dave Eggers est un écrivain fortement engagé en
faveur des droits de l’homme. Chez McSweeney’s, la maison d’édition
indépendante qu’il a fondée à San Francisco, il publie notamment la collection
« Voice of witness », qui recueille des témoignages oraux de victimes
de l’injustice sociale. Zeitoun
prolonge un ouvrage de cette collection. C’est un livre exemplaire.
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